Gardés à vue suite à la manifestation du dimanche 6 mai : 120h de TIG pour certains

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Deux jeunes de 22 et 23 ans sont accusés d’avoir jeté des projectiles sur la police et le commissariat de la place Sathonay à Lyon, le soir du dimanche 6 mai, alors que l’un d’eux n’est pas passé sur cette place et que l’autre avait été blessé place Bellecour.

Comparution immédiate du lundi 7 mai 2007

17h06

Messieurs L et M ont respectivement 23 et 22 ans, des policiers disent les avoir vu jeter des projectiles sur des fonctionnaires de police et le commissariat du 1er arrondissement, le dimanche 6 mai au soir sur la place Sathonay à Lyon .

Ils sont accusés d’avoir exercé des violences, sur des fonctionnaires de police dans l’exercice de leur fonction, n’ayant pas entrainé d’ITT [1].

Monsieur M a un emploi stable depuis plusieurs années, son casier judiciaire ne mentionne qu’un délit mineur datant de 4 ans. Il affirme dés le début du procès ne pas s’être mélé aux événements.

Monsieur L a un emploi en CDI depuis 5 ans, il n’a pas de casier judiciaire.

« Ce sont deux garcons qui se trouvent devant le tribunal, on ne comprend pas bien pourquoi... »lance le juge.

Les faits décrits par le juge (qui lit les procès verbaux)

- Concernant monsieur L

Durant la manifestation d’hier soir, une dizaine d’individus jettent des bouteilles sur le commissariat de police du 1er arrondissement de Lyon. Sans jamais vous perdre de vue les policiers vous ont vu en train de jeter des projectiles sur le commissariat place Sathonay, puis prendre la fuite vers les quais de Saône ; vous êtes identifiés par la police grâce à votre tenue vestimentaire et interpellé vers 00h50. Le policier P certifie dans son procès verbal que vous étiez bien place Sathonay hier soir.

Les policiers se sont trompés je n’ai jamais jeté de projectile ; tout le monde courrait, j’ai courru aussi. Au début j’étais à Bellecour pour manifester, c’était une bonne ambiance puis c’est devenu le feu et on a courru jusqu’à la place Sathonay.

Qu’avez vous fait entre la place Bellecour et la place Sathonay ?

« Je n’ai pas jeté du tout de bouteille ; j’ai pris un coup de flash ball sur la place Bellecour à la fin de la manifestation ; alors j’ai enlevé mon t-shirt je l’ai mouillé dans la fontaine et me le suis appliqué sur le corps parce que j’avais mal. Un ami était avec moi pour m’aider. Et puis les gens se sont mis à courrir partout alors j’ai courru aussi. J’ai fui jusqu’à la place Sathonay, j’avais pris un tir de flash ball, j’avais peur d’en prendre un deuxième ou un coup de matraque. »

Comment expliquez que la police vous ait vu place Sathonay en train de jeter des pierres ?

« Je ne sais pas, je rentrais chez moi et en passant vers la place Sathonay une voiture de police s’est arrêtée à mes côtés et je me suis fait interpeller ; je n’ai pas fui, je dis la vérité ».

Ca aurait été plus agréable si vous nous aviez dit ce que vous aviez fait...

« Je dis la vérité » répète le prévenu.

- Concernant monsieur M

Mêmes dépositions : les policiers vous voient jeter des projectiles sur le commissariat du 1er arrondissement, vous êtes identifié par votre tenue vestimenatire et interpellé sur les quais de Saône non loin de la place Sathonay.

« J’ai passé l’aprés midi à sur la colline de la Croix Rousse avec des amis et je suis descendu vers le centre ville pour rentrer chez moi, vers la passerelle où j’ai été interpellé. Une voiture de police s’est arrêtée et les policiers m’ont embarqué ; j’ai demandé pourquoi on m’arrêtait, un policier m’a répondu »ferme ta gueule".

Les réquisitions du procureur

Les prévenus portaient des tenues vestimenatires caractérisées.

Le tir de flash ball a raison sur monsieur L, les policiers visent sciemment quelqu’un qui a fait quelque chose. C’est un constat qui ne peut pas souffrir de contradiction dans la mesure où il repose sur l’évidence (!).

Je requiers 6 mois ferme et leur mise en détention immédiate.

La défense des prévenus, assurée par 2 avocates

- Monsieur M

Il n’y a aucun élément dans cette affaire. Monsieur M rentrait simplement chez lui, sa tenue vestimentaire qui le désigne n’a rien d’exceptionnel quand 300 personnes sont présentes : bleu blanc et noir.

Il n’y a pas lieu de condamner monsieur M. 

Monsieur M est seul avec sa soeur en France depuis 5 ans, son père travaille à l’ONU. Il est dans une situation de soutien certain avec sa soeur quand son père et le reste de sa famille sont à Dakar.

C’est un jeune homme sérieux qui est chargé de clientèle depuis plusieurs années chez France Telecom.

C’est pourqoui je demande la relaxe de mon client ; si vous choisissez de le mettre en détention, je demande la plus grande clémence du tribunal et une peine de sursis.

« Je me suis trouvé au mauvais endroit au mauvais moment » ajoute le prévenu.

- Monsieur L

Pourquoi remettre la parole de mon client en doute ?

Il n’a pas pu regagner immédiatement son domicile depuis la place Bellecour parcequ’il avait été blessé par un tir de flash ball. Quand 3 a 400 personnes sont réunnies, des tirs de flash ball ont lieu, mais pas toujours bien ciblés.

Quand il décide de courrir parce que c’est la panique place Bellecour, il a un comportement de mouton, certes monsieur le juge, mais il a peur et c’est par peur qu’il se met à courrir comme les autres, pas parcequ’il a commis un forfait.

Plus tard il est torse nu : dans la course il a perdu son t-shirt qu’il avait enlevé et utilisé pour s’appliquer de l’eau froide sur sa blessure.
C’est une personne qui est torse nu et qui court et peut apparaitre aux yeux de la police comme suspecte. Mais la police a pu commettre une erreur, c’est possible !

Il n’y a pas de preuve irréfutable d’un jet de projectile.

Je demande la relaxe de mon client.

17h45

Délibéré

Messieurs L et M sont tous les deux reconnus coupables des faits qui leur étaient reprochés.

Le tribunal les condamne chacun à 120h de Travaux d’Intérêts Généraux à éxécuter dans les 18 mois à venir ; en cas d’inéxécution des T.I.G. ils seront directement condamnés à 3 mois de prison ferme.

Ils doivent aussi payer 200€ chacun d’amende.

P.-S.

En plus ils écopent tous les deux d’une inscription sur leur casier judiciaire au titre de violence sur des fonctionnaires de police, ce qui plombe un dossier en cas de passage devant un tribunal. Ca fera 2 inscriptions pour l’un des inculpés.

Ce lundi 7 mai 2007, pour tous les inculpés de la manifestation du dimanche soir 6 mai, le procureur a requis au minimum 6 mois ferme, quelles que soient les accusations, les individus, leur histoire. En somme, pas de personnalisation des peines comme l’exige la justice.

Et pour terminer, 2 inculpés en 1/2 heure, ca fait 1/4 d’heure pour juger un homme, sans parler des 1 h30 maximum dont ont disposé leurs avocates entre la découverte du dossier et le début de l’audience. « Saine justice » commentera un avocat présent sur les lieux.

Notes

[1Incapacité Totale de Travail

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