Le 18 mars 1871
À trois heures du matin, l’armée de la République française, sous les ordres d’Adolphe Thiers, rentre dans Paris. Son objectif est clair : prendre le contrôle des canons parisiens sous les ordres de la Garde nationale. Ils avaient été fondus durant le siège de Paris (17 septembre 1870 au 26 janvier 1871) pour lutter contre l’invasion prussienne. Financés avec les deniers du peuple de Paris, ils étaient alors sous le commandement de la Garde nationale (force armée locale composée essentiellement de parisiens, organisée en quartier et élisant ces officiers).
C’était la troisième tentative du gouvernement (après celles du 8 et 16 mars), pour reprendre le contrôle de cette puissance de feu qui menaçait son autorité. Paris était alors en pleine ébullition après la défaite lors de la guerre franco-prusienne (1870-1871), et plusieurs décisions économiques en défaveur des petits artisans et commerçants.
A 6h du matin, les troupes du général Claude Lecomte s’emparent des canons de Montmartre avec succès, blessant mortellement l’une des sentinelles (le Garde national Turpin) dans l’opération. Mais les attelages prévus pour emporter les pièces d’artillerie se font attendre ... Alarmés, les Gardes nationaux et la population accourent et encerclent le 88e régiment d’infanterie. Les femmes, parmi lesquelles Louise Michel, haranguent les soldats, et la foule se fait de plus en plus hostile. A 8 heures, se sentant menacé, le général Lecomte prend une décision qui provoquera une suite d’évènement qui finira par lui coûter la vie. Il commande à trois reprises à ses hommes de tirer dans la foule. Mais sous les ordres du sergent Verdaguer, son sous-officier, les soldats mettent crossent en l’air puis fraternisent avec le peuple. L’intervention militaire se mue alors en insurecction.
Tout l’Est de Paris s’érige alors en barricade et les forces militaires aux ordres du gouvernement pro-monarchiste d’Adolphe Thiers refluent vers les quartiers Ouest de Paris, plus bourgeois et pas encore ralliés à l’insurection. Le gouvernement donne alors l’ordre de réunir les gardes nationaux des quartiers bourgeois pour reprendre le contrôle de la ville. Sur les 12.000 hommes mobilisables, seulement 600 répondront à l’appel pour au final rentrer chez eux : la contre insurection n’aura pas lieu. Face à la révolte qui s’étend dans toute la ville et son incapacité à l’endiguer, le gouvernement décide vers 15h d’abandonner Paris et de se réfugier à Versailles.
Vers 20 heures, l’état-major de la Garde nationale, place Vendôme, et la préfecture de police sont au mains des insurgés alors que l’Hôtel de Ville est encerclé. Les ordres du Comité Central sont alors purement défensifs : « barricades partout. Ne pas attaquer ». Le bataillon de Garde nationaux cernant l’Hôtel de Ville se retire pour laisser Jules Ferry, alors maire de Paris, abandonner le bâtiment à l’insurrection. Vers 23 heures, le bâtiment est envahi, et le comité central de la Garde nationale s’y installe. Dans la journée le général Lecomte fut fusillé par ses soldats, en même temps que le général Clément Thomas, massacreur de la révolution de 1848, reconnu près de la place Pigalle par un lieutenant de la Garde Nationale. L’armée et le gouvernement sont en déroute.
Le jour même le comité central de la Garde Nationale, devenu seul maître de Paris, appelle à des élections qui se dérouleront le 26 mars. La Commune est proclamée deux jours plus tard et durera jusqu’à la Semaine sanglante (21 au 28 mai 1871), durant laquelle Adolphe Thiers et ces chiens finirent par rentrer dans Paris en y déclenchant un bain de sang (entre 20.000 et 30.000 morts). Avec à peine deux mois d’existence, la Commune de Paris sera alors l’un des plus important laboratoire de l’histoire du socialisme révolutionnaire. Ébauchant une société démocratique, la Commune choisit de mettre en place des mandats impératifs pour ces représentants élus par tous (mais pas encore par toutes, le suffrage “universel” restant masculin même si le vote des femmes fut envisagé). Les entreprises abandonnées sont saisies et remises aux mains de coopératives ouvrières afin de relancer la production et supprimer le chômage et la misère. La liberté de la presse est ré-affirmée dès le 19 mars, allant jusqu’à laisser les journaux anti-communards paraître en pleine insurrection. Les fonctionnaires manquants (justice, enseignement) sont remplacés par des citoyens élus par le peuple, et leurs salaires sont plafonnés à celui d’un ouvrier. Le 2 avril, la séparation de l’Église et de l’Etat est votée et les biens de l’Église saisis.
Il faudra par la suite plusieurs dizaines d’années à la Troisième République pour réaliser ne serait-ce que la moitié des avancées sociales et politiques que réalisa la Commune en deux mois, et encore aujourd’hui, beaucoup de ces réalisations restent la hantise de nos politicards bourgeois.
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