Ce n’est pas quelques sous de plus qui va faire revenir ce fils, ce
frère, assassiné par ce gendarme. Ce n’est pas ce qu’elle
demandait. Elle demandait au minimum que ce gendarme, reconnu
incompétent, ne puisse plus jamais porter des armes. Porter une arme
exige encore plus de compétences. On doit savoir ce que l’on a entre les
mains et on ne peut pas utiliser une arme pour faire n’importe quoi.
Comme bien souvent, en tout cas dans cette affaire, la justice accorde tous les égards à ce gendarme qui a tué, auquel on ne donne qu’une condamnation purement symbolique. Et la famille, les amis
d’Aurélien reste dans le désarroi le plus total.
Et pourtant, le procureur général, qui avait fait appel du jugement de
Montbrison, suite aux demandes de l’avocate Marie-Noëlle Fréry et des
associations, et qui s’était apercu que le procès de Montbrison était un
véritable déni de justice, avait dit que, cette fois, lors du procès en
appel de Lyon, « on aurait droit à un procès équitable ». Mais la Cour
d’appel de Lyon ne l’entendait pas de cette oreille en prononçant ce
même déni de justice. Y a-t-il une justice équitable possible sur la
région judiciaire de Lyon ?
Que sommes-nous en train de faire ? Dans quel pays sommes-nous ?
On ne se gêne pas de condamner très lourdement des jeunes, parfois
innocents, qui se trouvent sur le lieu d’une révolte légitime ou d’une
manifestation, et cela par plusieurs mois de prison ferme et un casier
judiciaire... Et cela pour des inculpations minimes, en tout cas pas du
même ordre que de tuer un jeune de 24 ans. Veut-on condamner la jeunesse
de France ?
Veut-on couvrir les assassinats de jeunes, les faits illégitimes très
graves de la police ou de la gendarmerie ? Pourquoi ne sanctionne-t-on
pas toute cette chaîne d’irrégularités graves commises par le gendarme
Salesses, mais aussi par la gendarmerie de Feurs, toutes autant reconnues formellement les
unes que les autres aussi bien par le tribunal de
Montbrison que par la quatrième chambre de la Cour d’appel de Lyon ?
Ce jeune a été abattu par le gendarme Salesses qui tenait un fusil à pompe, le 10 mars 2003, alors qu’Aurélien était de dos, qu’il avait des
menottes, qu’il était tout à fait calme, pacifique, dans un camion, en train de
sortir les deux chiens, et qu’il avait reconnu lui-même s’être introduit dans un
hangar.
La famille, déjà accablée par la mort d’Aurélien, a reçu en plus, après
avoir porté plainte, des intimidations sous formes de coups de téléphone
menaçants et même des lettres anonymes ignobles.
Pourquoi a-t-on tout fait pour que l’expert en balistique ne puisse pas
intervenir au cours des procès, aussi bien à Montbrison qu’en cour
d’appel de Lyon, alors qu’il avait des impératifs d’horaires ? C’était
capital puisque cette expertise contrecarrait complètement les
dépositions fantaisistes des gendarmes et prouvait les mensonges du
gendarme Salesses. Selon les dires du gendarme Salesses la traction du
chien aurait dû déporter le canon du fusil à pompe vers la droite, alors
que cet expert, dans son rapport, dit formellement que cela ne pouvait que
déporter le canon vers la gauche. Cela a même été reconnu par le
president Finidori.
Pourquoi a-t-on refusé de faire des tests d’alcoolémie tout de suite sur
les gendarmes ? Alors que cela a été effectué sur le cadavre d’Aurélien
Joux (qui d’ailleurs était négatif).
Pourquoi aucune enquête n’a été réalisée sur la gendarmerie de Feurs,
qui a entrepris ce soir-là des actions dans la plus grande confusion, et
notamment en qui concerne les consommations d’alcool ? Pourquoi, alors que la conduite en état d’ivresse est durement réprimée en France, à aucun moment, dans chaque procès aussi bien à Montbrison qu’à Lyon, on ne parle d’une possibilité d’ébriété du gendarme ?
Pourquoi seul le gendarme qui a tiré a-t-il été mis en examen ? Son
supérieur hiérarchique, qui est responsable d’une opération conduite
avec une incohérence incroyable, n’est pas inculpé.
Pourquoi ce soir-là au sein de cette gendarmerie, les procédures
n’ont-elles pas été effectuées dans les règles ? Le procès-verbal de
garde à vue n’est ni enregistré, ni signé. Les droits de la personne
gardée à vue ne sont pas signifiés. Aurélien n’a vu ni médecin, ni
avocat.
Pourquoi emporter des fusils à pompe alors qu’Aurélien est menotté et
coopératif, alors que cela est effectué en violation du décret du 20 mai
1903 ? Pourquoi s’occuper de faire enlever la camionnette en pleine
nuit ? Pourquoi utiliser 12 gendarmes pour un délit mineur ?...
Pourquoi l’extrême incohérence dans les réponses du gendarme Salesses
n’est-elle pas prise en compte, ni au tribunal de Montbrison, ni en cour
d’appel de Lyon ?
Pourquoi le gendarme Salesses avait-il complètement armé son fusil à
pompe browning, alors que la situation ne l’imposait pas et que même le
règlement l’interdit ? Pour tirer ce soir-la, le gendarme Salesses avait
dû au préalable approvisionner, armer le fusil en actionnant la pompe,
enlever la sûreté, avant de viser, en maintenant l’arme, dans la
direction d’Aurélien (sinon le coup part en l’air), et appuyer sur la
détente avec une pression de 2,7 kg, donc une pression très importante.
Peut-on encore parler dans ces conditions d’homicide involontaire ?
La justice donne-t-elle le permis de tuer ?
Aurélien a été tué le 10 mars 2003. Presque au même moment, le 2 mars
2003, le jeune nîmois Mourad Belmokhtar, 17 ans, a été tué par un
gendarme à Durfort, et le 13 mars 2003, le jeune Nicolas Billotet, 23
ans, est mort sous les balles d’un policier dans le neuvième
arrondissement de Lyon.
En ce qui concerne la mort de Mourad Belmokhtar, l’avocat de la
famille, Francois Roux, avait demandé, en février 2005, au juge
d’instruction une enquête pour savoir pourquoi les gendarmes avaient
menti sur ordre et ce qu’ils avaient caché, après la découverte du
mensonge des gendarmes sur le déroulement des faits. Il avait également
réclamé une nouvelle reconstitution des faits, puisque le gendarme
responsable de l’opération avait modifié son témoignage et indiqué qu’il
n’était pas sorti de sa voiture l’arme au poing. Il ne s’estimait donc
pas menacé. Du coup, la thèse de la légitime défense
ne tient plus...
En ce qui concerne la mort de Nicolas Billotet, suite à la plainte déposée, des intimidations
pour la famille se sont aussi produites sous formes de lettres
menaçantes. Une reconstitution a eu lieu, mais, après plus de trois ans,
aucun procès ne semble encore prévu...
Un autre jeune, Nourredine Ramdani, 18 ans, est mort récemment, le 16
mai 2006, dans une course poursuite avec des policiers de Montpellier
dans des conditions pas très claires et pour le moment aucun juge
d’instruction n’est encore nommé pour cette affaire...
Cette justice de connivence est-elle la même si on est policier ou gendarme, plutôt que jeune ou simple
citoyen ?
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