Ce weekend avec quelques amiEs on s’est dit qu’on ferait bien un petit tour en festival, le Bugey C’Trip c’est militant, ça va être sympa, et puis la prog avait l’air vraiment chouette. Effectivement on s’enjaille bien, on pogote sur le ska, les sandouiches à la saucisse sont délicieux. Mais alors même que je tapais du pied devant le sound system, voilà qu’arrive une chose somme toute assez commune lorsqu’on est une femme : un type vient se coller à moi et me lance un subtil « alors, tu aimes bien pogoter ? ». Je lève les yeux, lui réponds calmement « oui, et alors ? » et m’écarte de lui. Plutôt que de s’éloigner en se disant que sa drague subtile n’a pas fonctionné, et qu’il devrait peut-être tenter une autre méthode, il revient, et devant ma mine morose à sa vue, me dit de sourire, en me montrant l’exemple. Je lui fais non de la tête. Mais Monsieur refuse de se laisser abattre et reviens, une fois, deux fois, six fois en fait. A la septième tentative d’approche ma patience a des limites et je le repousse de la main.
Du coup avec les copainEs on va le voir pour lui dire d’arrêter et de partir, et on le signale aux personnes de l’organisation du festival. Quelle n’est pas notre surprise lorsque nous nous entendons dire (nous étions plusieurs, dont des témoins oculaires directs) qu’ils ne peuvent pas lui dire de partir, parce qu’il n’y a pas de preuves et que c’est « sa parole contre la votre ». Il m’est donc sympathiquement conseillé de passer mon chemin, et de l’éviter puisqu’il est relou. C’est normal, je n’ai qu’à pas le tenter par ma présence provocatrice. C’est vrai, quand même, en portant un sweat à capuche je l’ai un peu cherché. On me dit également qu’il faut le comprendre parce qu’il a bu, et que moi aussi, donc bon, ça n’est pas important. Il est bien connu qu’on a le droit d’être sexiste dès qu’on est saoul.
Il est inacceptable que dans un festival militant, face à une situation de harcèlement sexuel, ce soit la victime qui doivent courber l’échine et s’en aller. Est-ce si compliqué de dire à un homme coupable de ce genre de fait de quitter le concert ? Est-ce si difficile de comprendre la peur que cela distille dans l’esprit de la victime ? La détresse qui en découle, l’injustice de la solidarité patriarcale sont choquantes de la part d’un festival qui se réclame de valeurs progressistes et d’une volonté de réfléchir au monde dans lequel nous vivons.
Je ne blâme pas ici l’ensemble du festival, que je fréquente depuis plusieurs années déjà, mais il serait souhaitable que ce genre de situation soient réfléchies et gérées d’une manière moins sexiste à l’avenir. Ou alors le festival risque de se vider d’une bonne partie de ses participantes, et également des participants qui se sentent un minimum solidaires du sexe opposé.
Compléments d'info à l'article
Proposer un complément d'info