Cet accord est une attaque extrêmement grave contre les travailleuses et les travailleurs.
Malgré la gravité de cette attaque, la mobilisation est loin d’être à la hauteur de la riposte nécessaire. Nous pensons qu’il est nécessaire d’analyser les causes de cette mobilisation insuffisante, pour envisager une stratégie à même de développer le rapport de force nécessaire contre cet accord scélérat.
Information insuffisante des travailleurs et travailleuses, propagande bourgeoise
Si les organisations appelantes ont engagé une large campagne d’information avant cette journée (2 millions de 4 pages tirés et en grande partie diffusés pour la CGT par exemple, à la fois dans les boites et sur les territoires), celle-ci n’a pas suffit à interpeller la majorité des salariéEs.
Malgré le travail d’arrache-pied de milliers de militantEs syndicalistes, une majorité des salariés n’a pas connaissance de cet accord ou n’en perçoit pas le caractère gravissime.
Quelles en sont les raisons ?
La propagande patronale et étatique d’abord, qui représente un rouleau compresseur idéologique.
L’ANI a été signé en plein commencement de la guerre au Mali et a été opportunément relégué à la marge des actualités dans les médias bourgeois.
L’ensemble des « éditorialistes » s’est ensuite empressé de faire l’apologie de cet accord. Cela a été accompagné par une violente campagne contre la CGT, accusée de jusqu’auboutisme et de surenchère radicale.
Pour appuyer cette campagne de propagande, les médias bourgeois ont pu compter sur la participation active de l’appareil CFDT, dont plusieurs dirigeants ont été récemment remerciés pour leur bons et loyaux services au PS et à la bourgeoisie (Nomination de François Chèrèque à l’IGAS, chargé du suivi sur le plan pauvreté, de Laurence Laigo au cabinet de Najat Vallaud Belkacem, de Nicole Notat au groupe de Travail « Promouvoir et valoriser l’entreprenariat responsable(sic), entre autre choses...)
Cette campagne médiatique a ainsi mis en avant les prétendus aspects positifs de l’accord, en se gardant bien de mettre en question leur réalité, et en masquant les mesures antisociales qui constituent l’ossature de cet accord.
A côté de cette campagne médiatique, les organisations jaunes signataires ont mené leur propre campagne en faveur de l’ANI dans les entreprises, dénigrant les organisations syndicales s’y opposant, ajoutant leur voix à celle des patrons.
De telles campagnes ne sont pas une nouveauté. Mais le mouvement syndical et le mouvement social doivent se doter de leurs propre moyens de contre-propagande à l’échelle de masse, et les développer. A ce titre, le très faible investissement du champs audiovisuel (internet) par les OS les prive d’un moyen efficace sur ce terrain.
A côté de cela, l’ensemble des travailleuses et des travailleurs mobilisés, l’ensemble des organisations populaires qui cherchent à développer la lutte, ont tout intérêt à développer leurs propres outils pour combattre la propagande bourgeoise : argumentaires écrits, tracts, affiches, vidéo explicatives, blogs, etc...
Enfin, sur les territoires (quartiers, communes), nous avons tout intérêt à développer des espaces de coordinations de cette contre-propagande, de manière intersyndicale à la base. Cela afin de toucher les travailleuses et travailleurs des entreprises ou la présence syndicale est inexistante, et de contribuer ainsi à développer l’organisation dans les entreprises, et rendre plus concrète la perspective de développement de la grève.
Conséquence de la logique électoraliste
L’échec du 5 mars a aussi pour cause les illusions entretenues sur « la gauche » et plus largement « le changement par les urnes », par les partis politiques, les médias, mais aussi les appareils et les militantEs politiques électoralistes au sein des organisations syndicales et plus largement des organisations populaires.
Tout d’abord parce que celles-ci ont entretenu l’idée que la nature du pouvoir politique changeait en cas d’alternance, alors que l’Etat, quelle que soit la couleur politique des gouvernants, défend les intérêts de la bourgeoisie. La seule différence est éventuellement la méthode, encore qu’en période de crise, celle-ci varie peu, à part sur le plan verbal.
Les seuls progrès sociaux n’ont jamais été l’oeuvre que du rapport de force, arrachés à la bourgeoisie et à l’Etat par la lutte.
Ces illusions ont donc contribué à désarmer les travailleuses et les travailleurs, en leur faisant croire -ou tentant de leur faire croire- que l’alternance allait entraîner un changement de politique, ou au moins une pause dans l’offensive capitaliste.
En réalité, malgré quelques mesures visant à accréditer cette stratégie de communication, les mauvais coups ont commencé à pleuvoir sur les travailleuses et travailleurs dès le début de l’alternance. La logique électoraliste a conduit à concevoir la période comme une rupture alors qu’il s’agissait pour l’essentiel de la continuité d’une période d’offensive capitaliste en période de crise.
Ensuite, parce que les réseaux politiques proches du pouvoir socialiste dans les organisations syndicales combattent toute perspective de mobilisation d’ampleur contre le gouvernement. Soit en défendant ouvertement sa politique au nom du « moindre mal », soit en enfermant l’activité syndicale dans une activité de lobbying, tournée vers l’interpellation des parlementaires, plutôt que vers la construction d’un rapport de force sur le terrain économique.
A l’opposé de cette logique, les travailleuses et travailleurs ont tout intérêt à utiliser les armes du mouvement syndical (grève, boycott, sabotage, blocage de la production et des flux économiques...), à cesser de considérer l’Etat comme un outil neutre mais plutôt comme un défenseur du patronat quelle que soit la couleur des gouvernants, et à développer partout des outils d’une lutte prolongée (caisse de grève, liens au sein des ateliers, des services, entre entreprises...).
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