Soirée pédagogique autour de l’évaluation (29/01)

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SOIREE PEDAGOGIQUE
AUTOUR DE L’EVALUATION
vendredi 29 janvier a 19h30
au local de la CNT Educ,
44
rue Burdeau 69001 LYON.

Pourquoi une soirée
autour de l’évaluation ?

La problématique de l’évaluation
est interprofessionnelle, elle
touche tous les champs du
travail social, du soin, de
l’éducation, de la culture… La
CNT éduc 69 défend des
pratiques de classe différentes
« instruire pour révolter », oui,
mais pas n’importe comment, et
ce de la maternelle à
l’université : toutes les
expériences, points de vue sont donc les bienvenus.
Il nous semble important également que les syndicats
reprennent l’initiative d’une offensive pédagogique.

Comment et pourquoi valide-t-on l’acquisition d’un savoir à
l’école : est-ce pour donner des repères aux élèves, pour
communiquer aux parents, ou pour rentrer dans une entreprise
de contrôle social ?

Cette soirée est conçue comme un échange de pratiques, pour cela, il est fait
appel à contribution de militant-es ou non, syndiqué-es ou non. Cet appel à
contribution invite les collègues à présenter un système d’évaluation qui ne
stigmatiserait pas les élèves, et il est demandé dans la mesure du possible
d’amener du matériel.

S’ensuivra un moment de discussions informelles qui permettra d’approfondir nos
réflexions et de lancer des pistes pour d’autres soirées !

SOIREE PEDAGOGIQUE
AUTOUR DE L’EVALUATION

vendredi 29 janvier a 19h30
au local de la CNT Educ,
44 rue Burdeau 69001 LYON.

JPEG - 2.5 Mo

Évaluations : quelles logiques, quels enjeux ?

-  Texte extrait du journal de la CNT-Educ 69

L’année dernière, les évaluations de
CM2 et de CE1 ont provoqué une
indignation générale. A la fois pour
des raisons qui tiennent à la nature
de l’épreuve : la confusion entre
bilan et diagnostic, les questions sur
une partie du programme non
étudiée, les items non adaptés aux
cursus général des élèves, le codage
binaire des réponses, l’impossibilité
de cerner, à partir de ce test, les
compétences réelles des élèves, et
bien sûr le caractère ultra sélectif de
certains items et du temps accordé.
A cause, aussi, du but avoué par la
hiérarchie, d’en faire un moyen pour
vérifier la bonne application des « 
nouveaux programmes » dont
personne ne veut, et de servir de
critère pour la mise en place de
l’aide personnalisée, alors que
justement la forme du test ne
permet pas de comprendre d’où
viennent les difficultés rencontrées
par les élèves. Et puis pour des
raisons plus essentielles qui tiennent
à la fonction que les évaluations
jouent dans la politique
gouvernementale ; le fait qu’elles
soient sans cesse présentées comme
un « outil de mesure par les résultats
pour gouverner ».

Ces critiques émanant des
enseignants, comme des parents
d’élèves, ont donné lieu à de
nombreuses tentatives pour
empêcher leur mise en place :
boycott, refus de faire passer certains
items, refus de faire remonter les
résultats, confiscation des livrets
d’évaluation par des parents
d’élèves, grève des enseignants
concernés le jours de passation de ces
« examens ». Toutes ces stratégies
ont été largement freinées par la
timidité du soutien des centrales
syndicales et par les pressions
exercées par les inspecteurs sur les
enseignants récalcitrants mais
souvent isolés. En de nombreux
endroits, les résultats ont malgré
tout été faussés ou ne sont pas
remontés, ce qui n’a pas empêché
les inspections de les mettre en
avant pour valoriser ou menacer
certaines écoles et obliger les RASED
à en faire leur principal outil
d’analyse et de fonctionnement. Les
critiques qui ont été faites l’année
dernière sont toujours d’actualité
dans la mesure où le ministère
compte renouveler l’expérience telle
quelle.

De toutes façons, la justification
générale de toute évaluation depuis
89 , et qui était de nouveau
avancée par Darcos de « mesurer
objectivement les acquis des élèves
 », n’est plus en fait qu’une vague
incantation rituelle dépourvue de
toute réalité, un simple alibi pour ce
qui est une opération de pouvoir, de
disqualification, de gestion
autoritaire de ce que doit devenir
l’école soumise à la culture du
résultat, la mesure de la
performance, le classement et lacomparaison, l’assignation à des
normes de réussite, tant pour les
élèves que les enseignants et les
établissements. Les conditions de
passation largement détournées,
adaptées, hétérogènes, la diversité
des formes de remontée des
résultats, 22% officiels de non remise
des livrets, les pressions et menaces
sur certains IEN pour carrément
trafiquer les résultats, le fait que
l’administration ait voulu à tout prix
les utiliser malgré leur peu de
fiabilité et leur non sens montre bien
que l’objectif affiché de « mesurer les
acquis » n’est qu’un prétexte, et que
l’objectif est bien ailleurs.

Dans l’ensemble de la fonction
publique, l’évaluation des personnels
devient un outil de contrôle et de
gestion essentiel, et il serait étonnant
que l’Éducation Nationale échappe
à cette logique. Ces évaluations
nationales de masse sont amenées à
être un des instruments privilégiés
d’un fonctionnement au mérite
(classement des écoles puis des
enseignants), et d’une politique
d’économies et de surveillance. A
terme, l’objectif visé est de mettre au
pas les enseignants afin de revenir
aux suposés fondamentaux d’une
école dont nous ne voulons pas qui
produit de la différentiation,
sélectionne, trie, oriente, reproduit les
inégalités sociales et relégue le plus
grand nombre...

C’est pour cela que nous pensons
que tous les enseignants doivent
manifester leur refus de mettre en
place ces évaluations en fonction des
possibilités et dynamiques locales.
Dans certaines académies, comme
Paris et Montpellier, ce refus
s’exprime même par un mouvement
de grève le lundi 18 janvier. Sur Lyon,
la CNT Éducation a choisi de profiter
de cette occasion pour vous inviter à
une soirée-débat sur ce thème.


Mais où est passée la note ?

- Texte extrait du journal « N’autre école » et écrit par la section CNT du collège Henri Barbusse de Vaulx-en-Velin

Contexte :

Le collège Henri Barbusse est situé à Vaulx-en-Velin, en banlieue lyonnaise. C’est un établissement présenté comme « difficile » : d’abord REP, puis prévention violence et enfin RAR (réseau ambition réussite). Les difficultés sociales des familles y sont très importantes. En 2002, quasiment 90% des familles étaient classées dans la catégorie sociale « défavorisée » avec 65% d’élèves boursiers. A titre de comparaison, la moyenne des REP était alors de 40% d’élèves boursiers et 63% de familles défavorisées. Dans ce contexte où les résultats aux évaluations de 6e étaient très faibles et inférieurs de 10% à la moyenne des REP (53% de réussite en français et 45% en mathématiques), la question de travailler autrement pour aider tous les élèves (ceux en grande difficulté tout comme les élèves en réussite) tout en conservant l’hétérogénéité (le regroupement des élèves par niveaux étant considéré comme éthiquement irrecevable par l’équipe pédagogique) au sein des classes s’est imposée. Retour sur un peu plus de 10 ans d’expérimentation.

Dix ans déjà...

C’est ainsi qu’il y a dix ans, un petit groupe d’enseignants motivés s’est réuni pour réfléchir à cette question. Leur réflexion s’appuyait, au départ, sur le travail en compétences, sans note, utilisé en SEGPA. L’objectif était de faire un diagnostic précis à la fin de chaque trimestre et/ou contrôle pour connaître les points forts et faibles des élèves puis imaginer des solutions pour les retravailler avec eux. Le « travailler différemment » permettrait peut-être d’échapper à la stigmatisation de la note. C’était même une des préoccupations majeures des enseignants qui se sont lancés dans cette aventure : sortir de la note, souvent dévalorisante, parfois source de décrochage des élèves en difficulté (un élève en grande difficulté qui après de gros efforts passe de 5 à 8 en tire très peu voire aucune motivation pour la suite) et opter pour une évaluation qui permette ou tente à l’élève de se rendre réellement compte de ses progrès.

Le travail entrepris s’est d’abord centré sur les classes de 6e. Le but était de permettre aux élèves de réussir la transition de l’école primaire au collège. Chaque matière a mis à plat ses compétences disciplinaires. D’autres compétences, transversales, ont été élaborées. Elles correspondaient à des exigences et/ou savoir-faire communs à toutes les disciplines : avoir son matériel, tenir correctement ses cahiers, s’exprimer à l’oral et à l’écrit, trouver des informations dans différents supports, réutiliser ses connaissances dans des contextes variés... Le but de ces compétences transversales était de pouvoir faire un bilan précis et clair des difficultés de chaque élève afin de les surmonter et permettre à chacun-e d’avoir les outils nécessaires pour suivre dans chaque matière. Un temps était consacré en cours à l’auto-évaluation des compétences disciplinaires et, en vie de classe, à l’auto-évaluation des compétences transversales. Le but recherché étant d’amener les élèves à s’investir davantage dans leurs apprentissages. L’auto-évaluation était ensuite discutée avec l’élève et comparée avec l’évaluation de l’enseignant. Ce travail a mené l’ensemble des équipes pédagogiques de classe et disciplinaires à fournir un vrai travail en commun, qui a permis la mise en place d’exigences communes. Ceci était primordial pour la mise en réussite des élèves dans un collège qui ne « tournait pas rond » : outre les résultats « catastrophiques » des élèves, les problèmes de discipline, de refus de travail étaient nombreux. Il s’agissait donc d’instaurer un climat de confiance entre les adultes et les élèves pour rendre les apprentissages non seulement possibles mais aussi sereins.

Les balbutiements

Ce travail s’est mis en place progressivement et a considérablement évolué. Ainsi, au début, chaque compétence était évaluée selon 3 niveaux d’acquisition : A (compétence acquise), E (en cours d’acquisition) et N (non acquis). Or il est apparu que le niveau d’acquisition E était très large et vague entre un élève qui saisissait tout juste ce qui lui était demandé et un élève qui avait quasiment acquis une compétence. De plus, les élèves ont vite eu tendance à se mettre E à presque toutes les compétences. Ce niveau a donc été séparé en deux avec D (début d’acquisition) et P (presque acquis). Ensuite, afin de pouvoir apprécier au mieux l’acquisition d’une compétence et ne pas être uniquement dans le ressenti, des critères correspondant à chaque niveau d’acquisition ont été élaborés ainsi que des situations d’évaluation spécifiques par matière. Par exemple, pour la compétence « Je sais m’exprimer à l’écrit » l’équipe s’est mise d’accord sur les critères de réussite suivants :
A : Je sais répondre en faisant des phrases et en utilisant le vocabulaire spécifique de la discipline
P : Je sais répondre en faisant des phrases (Sujet + Verbe + Complément)
D : Je sais répondre sans faire de phrases
N : je n’arrive pas à formuler de réponse à l’écrit
Cette évolution s’est faite progressivement, sur 3 années. Nous sommes passés de 2 classes où des professeurs travaillaient en compétences à 4 classes puis toutes les classes de 6e où l’ensemble des professeurs prenant des classes de ce niveau acceptait de s’insérer dans la dynamique du projet.

Parallèlement et graduellement, le bulletin trimestriel « classique » a été remplacé par un nouveau bulletin où n’apparaissait plus les notes mais les compétences transversales. Une deuxième partie du bulletin était consacrée aux enseignements disciplinaires : chaque enseignant renseignait également le niveau d’acquisition de l’élève dans sa discipline (A, P, D, le « N » étant souvent proscrit) ainsi que des conseils pour progresser. Ces conseils, le plus précis possible, devant remplacer les traditionnelles remarques telles que « peut- mieux faire » ou « n’apprend pas ses leçons » jugées trop superficielles et qui n’apporte rien à l’élève. Ces évolutions ont été le fruit de nombreuses heures de concertation et de travail qui ont amené des doutes, de tâtonnements, de retours en arrière. Certains points ont fait l’objet d’âpres discussions avant leur mise en place. Ce fut le cas en particulier de l’élaboration des critères d’acquisition des compétences. Ce travail n’a été possible qu’avec la mise en place de concertations sur un créneau de 2 heures chaque semaine. A la suite de nombreuses demandes, ces heures ont donc été intégrées dans les emplois du temps (ajoutées au temps de service). En plus de cela, les enseignants se sont régulièrement mobilisés pour conserver des heures supplémentaires dans la DHG (dotation horaire globale), afin de mettre en place des espaces de remédiation : groupes de besoin constitués grâce à l’attribution de trois professeurs pour deux classes, heures d’ATP (aide méthodologique, faites par des enseignants) ou de TDS (remédiation ou approfondissement disciplinaire). S’il est intéressant de pouvoir cibler les difficultés de chaque élève, il est indispensable de pouvoir proposer aux élèves des moments où il leur est possible de tenter d’acquérir les compétences non acquises que ce soit au niveau disciplinaire ou au niveau transversal. Ceci a constitué et constitue encore, une priorité pour une bonne partie de l’équipe éducative.

Réactions

Ces « changements » ont été possibles par la volonté et l’investissement d’un certain nombre d’enseignants mais également par le soutien apporté par la direction de l’établissement lors des premières années, notamment dans la défense auprès de l’IA d’un projet très « coûteux » en heures poste et en paiement des concertations. Par ailleurs, les enseignants investis en classe de 6e ont intégré le PASI (Pôle académique de soutien à l’innovation). Les équipes du collège ont récemment décidé de cesser leur travail avec le PASI, celui-ci devenant de plus en plus un outil de l’administration pour tenter de mener à bien la casse du système éducatif en tentant, par exemple, de s’approprier un dispositif pédagogique innovant et en le détournant de son but initial, pour mettre en avant le socle commun.

Au sein de l’établissement les réactions ont été variées. Un certain nombre d’enseignants ont toujours eu une certaine méfiance face au travail mené, celui-ci étant jugé trop lourd (bulletins plus longs à remplir, gestion de plusieurs grilles de compétences) Certains ont donc « choisi » de ne plus prendre en charge de classe de 6e. Les élèves quant à eux se sont assez facilement intégrés dans ce mode de fonctionnement qui ressemble souvent à ce qui est pratiqué en école primaire. Lors d’une étude en 2006, plus de 75% des élèves disaient être satisfaits du fonctionnement. En revanche, la plupart d’entre eux précisaient être déstabilisés par le fait de ne pas avoir de notes. Cette remarque a également été faite par une petite majorité de parents qui, avec ce mode d’évaluation disait ne pas arriver à « situer » leur enfant par rapport à un niveau global. De manière à être le mieux compris possible des parents, le projet était (et continue d’être) présenté très tôt dans l’année, en général fin septembre, lorsque les enseignants communiquent les résultats des élèves aux évaluations nationales. Les bulletins étant remis en main propre aux parents et à l’élève, celui-ci est en général bien compris et leur permet de mieux connaître les points forts et faibles de leur enfant.

Evolution

Au cours des cinq dernières années, les enseignants ont tenté d’élargir cette expérience aux autres niveaux du collège, en particulier pour les 5e et 4e. Deux obstacles se sont alors interposés : tout d’abord, la réticence d’un certain nombre d’enseignants et la « lassitude » de certains face à la nécessité de toujours devoir « revendiquer » pour pouvoir ne serait-ce que maintenir l’existant. Le travail en compétences n’a donc pas pu être aussi abouti qu’en 6e sur les autres niveaux. Des collègues le poursuivent néanmoins dans plusieurs matières (anglais, espagnol, français, maths, EPS). Des grilles de compétences communes sont mises en place et permettent de construire les apprentissages sur des objectifs communs dans les niveaux 5e, 4e et 3e. Une classe de 5e et une classe de 4e expérimentent la mise en place de compétences transversales sur ces niveaux cette année.

Le travail mené au sein du collège Barbusse a été labellisé innovant par le rectorat. Des enseignants ont souvent été sollicités pour aller le présenter lors de formation. Or, à chaque rentrée, les heures des dispositifs sont menacées. Le chantage aux heures s’est fait, au fil des années, de plus en plus pressant. Le discours institutionnel est à chaque fois le même : vous êtes un établissement surdoté, soit vous gardez les dispositifs mais on augmente les effectifs, soit vous avez des effectifs corrects, mais plus de dispositifs. Des préavis de grève sont régulièrement posés pour la rentrée, et ont déjà été utilisés pour des questions de moyens.

L’évaluation : une question d’éthique et un enjeu idéologique

Le travail engagé en 2001est souvent entré en contradiction avec les valeurs dominantes dans la société, prégnantes aussi bien chez les collègues, chez les élèves et chez les parents d’élèves : le besoin de classer, de hiérarchiser, bref, de noter. Les discussions occasionnées par ces confrontations de valeurs ont souvent été très riches. Actuellement, le projet entre en totale opposition avec l’Institution, avec la mise en place du socle commun des connaissances et des compétences. L’ensemble du projet barbussien, en se basant sur les « compétences » avait été construit dans un but émancipateur pour les élèves et pour pouvoir donner du sens à leurs apprentissages. Les valeurs portées ici sont bien loin de la soupe idéologique sous-tendue par le socle commun. C’est encore la position de la majorité des enseignants, et des sections syndicales qui, depuis le début l’activité syndicale de l’établissement se retrouvent sur une position de refus du socle.

Groupes associés à l'article

CNT 69

  • 44 rue Burdeau - Lyon 1er
  • ud69 (at) cnt-f.org (UD)

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