Fêtes consulaires : la Ville de Lyon assiste la délégation chinoise dans ses coups de pressions sur les Tibétain.es

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Lyon 1 complément

Samedi 14 septembre avaient lieu, place Bellecour, les annuelles fêtes consulaires et la fête et le défilé des Bannières, grande opération de communication de la « marque » OnlyLyon, et grand déballage de propagande internationale. Déballage aussi des régimes répressifs et de leurs pressions sur les minorités.
Ce samedi c’est la délégation tibétaine qui en a fait discrètement les frais, avec l’assistance directe des organisateurs aux demandes des officiels Chinois de faire disparaitre cette délégation qu’ils ne sauraient voir....

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On pourrait probablement écrire un article entier uniquement sur ces fêtes consulaires annuelles et la fête et le défilé des Bannières. Comment on y hésite toujours entre le folklore et la nationalisme crasse. Comment la sélection des pays présents fait la part belle aux états les plus pourris et aux dictatures les plus répressives (« non, mais c’est les peuples qu’on fête, pas leurs dirigeants ! » (sic)).

Ce samedi une petite succession d’évènements, passés inaperçus pour la plupart des personnes présentes, illustrent bien toute l’hypocrisie de l’évènement.

Etape 1 : la délégation chinoise met la pression

Vers 15h les délégations défilent autour de la place en costumes folkloriques. On a droit aux drapeaux du Palio italien, au virilisme cosaque ukrainien, ou encore à la musique et à la danse Bollywood pour l’Inde. Bref on hésite tout le temps entre une version vivante du It’s a small world de Disney, et la plus grande concentration de clichés exotisants possible. Au milieu de tout ça une petite délégation tibétaine avec drapeau. Les cortèges finissent leur tour place Antonin Poncet, sur la petite esplanade devant la tour de Charité et le mémorial arménien.

Arrive le cortège chinois : l’ambiance y est moins folklorique (quoiqu’on ait droit au dragon géant avec porteur) et la tête du cortège est composée d’hommes en chemises blanches et pantalons noirs portant un grand drapeau chinois. Les autres membres du cortège, mixte uniquement à l’arrière, portent casquettes rouges et petits drapeaux, tous identiques.

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Le cortège chinois arrive en vue de la place Antonin Poncet

Voyant les drapeaux de la petite délégation tibétaine sur les marches de la place le cortège chinois s’arrête, les quelques officiels, visiblement très remontés, s’approchent d’un organisateur en costume. Plusieurs minutes de discussions animées, avec force gestes des officiels Chinois en direction de la délégation tibétaine [1]. L’organisateur des fêtes consulaires en costume finit par leur dire quelque chose qui calme les officiels Chinois, lesquels regagnent leur cortège, qui ne repart pas pour autant.

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Discusson entre officiels de Lyon (à gauche) et officiels chinois (à droite)

Étape 2 : les organisateurs se plient aux pressions chinoises, et font le sale boulot

Monsieur l’organisateur en costume rejoint deux personnes de l’organisation, sans costumes, mais reconnaissables au port d’un badge et - pour certains - d’un talkie à la ceinture. Il leur donne quelques ordres, puis ceux-ci partent en direction de la petite délégation tibétaine. Arrivés sur place ils demandent aux Tibétain.e.s de se rendre moins visibles : baisser les drapeaux, descendre des marches, en gros disparaitre pour ne pas choquer les yeux des officiels Chinois.

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Les « gentils organisateurs » demandent aux tibétain.e.s de disparaitre de la vue chinoise

La délégation tibétaine, très accommodante, ou trop consciente de son infériorité dans le rapport de force qui se joue, se plie à la demande, laquelle est alors énoncée comme temporaire. Ils et elles abaissent drapeaux et banderoles, et quittent les marches pour se mettre dans un coin à proximité du pied de la tour de la Charité et de l’entrée du métro. À 50 m de là les Chinoi.e.s doivent être satisfaits puisque leur cortège reprend sa marche pour gagner à son tour la place.

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Les drapeaux tibétains sont pliés...
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... et la délégation s’éloigne dans un coin de la place.
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Arrivée du cortège Chinois place Antonin Poncet

Étape 3 : Un mur de Chinoi.e.s pour cacher la délégation tibétaine et lui mettre la pression

De fait, la délégation tibétaine ne s’est pas encore assez effacée du point de vue chinois. On voit une dizaine de personnes, reconnaissable à leur ensemble blanc et noir, à leurs casquettes rouges et à leurs petits drapeaux, quitter la délégation chinoise et venir bloquer, littéralement, les Tibétains. Les organisateurs des marches consulaires sont là, présents, à quelques mètres, et ne font rien pour empêcher ce déploiement de force. Quelques Chinoi.e.s montent sur les marches pour encercler la délégation tibétaine, sans aucun geste explicitement violent mais avec tout ce qu’il faut d’expression corporelle : le coup de pression est plus qu’évident. Quelques empoignades verbales ont lieu, mais les Tibétain.e.s ne cherchent pas la confrontation et tendent plutôt à calmer le jeu. On entendra des dizaines de fois « Tibet IS China » comme unique élément de langage des Chinoi.e.s. Une dame âgée, extérieur aux deux délégations, tentant de placer son vélo entre les officiels chinois et la délégation tibétaine, subira un coup de pression de la part de jeunes hommes chinois, toujours sans gestes explicites, mais avec tout ce qu’il faut d’assurance et de virilisme pour faire comprendre « qui est le chef ».

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Pressions chinoises sur la délégation tibétaine
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Un petit peu de ségrégation et de pression à quelques mètres de la fête

Cette situation dure plus d’une demi-heure, les Tibétain.e.s sont coincés dans l’angle de la place par un double rang de Chinoi.e.s en quasi uniforme, et n’ont pas le droit de brandir leurs drapeaux et banderoles. Pendant ce temps tous les autres cortèges font la fête en musique à quelques mètres de là, dans une ambiance festive et folklorique.

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ça fleure bon la spontanéité et la démocratie tout ça...
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Un drapeau brandit, brièvement, en réponse au coup de pression

Le service d’ordre chinois finit enfin par quitter les lieux : leur cortège a déjà quitté la place et ils rendent tous un par un, casquette et petits drapeaux à leurs chefs, avant de s’en aller par petits groupes. Ni les gardes mobiles, présents depuis plusieurs minutes à moins de vingt mètres, ni les organisateurs des fêtes consulaires, travaillant directement pour la ville de Lyon, n’auront rien fait - bien au contraire - pour empêcher ce coup de pression.

Aux fêtes consulaires et au défilé des Bannières on invite tous les pays, on expose dans les rues de Lyon leurs folklores, leurs diplomaties ... et leurs répressions.

Notes

[1Les auteur.rice.s de ces lignes regrettent amèrement d’avoir été trop loin et de ne pouvoir vous rapporter le contenu de cet échange, qu’on image savoureux de bassesse diplomatique.

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  • Le 17 septembre 2019 à 12:10, par Coelio

    Votre article commet une erreur : il mélange deux manifestations organisées distinctement par :
    - la Ville de Lyon et le Corps Consulaire : les Fêtes Consulaires, village éphémère situé place Bellecour, où tous les pays présentant un consulat sont invités à exposer leurs richesses culturelles, gastronomiques, touristiques, etc.
    - Le Comité des Fêtes de la Ville de Lyon et l’association des Pennons de Lyon : la Fête et le Défilé des Bannières, qui avait lieu, certes, en même temps.
    Ce que vous avez observé et relatez n’a à voir qu’avec la seconde et non la première.
    Merci de rectifier.

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