Le coronavirus révèle la logique profonde de notre monde

1029 visites
Covid-19

De la destruction des habitats naturels à la destruction des habitats humains, des soulèvements de populations aux suicides des travailleurs, du suicide des adolescents aux jeunes terroristes. Tous ces drames font système selon une logique qui n’a pas de limites. La mondialisation libérale sème la mort.

Le coronavirus, symptôme d’une ère culturelle criminelle.
« L’Etat compte les sous, on va compter les morts »

La pandémie ne peut se réduire à une crise sanitaire. Son impact planétaire invite à penser ce qui se passe en profondeur dans le monde des humains. Elle opèrerait ainsi comme un révélateur qui confirmerait ce que beaucoup pressentent depuis longtemps. Comme un réactif qui provoque un précipité pouvant devenir… explosif.
Pour s’en convaincre, il suffit d’analyser des conditions du surgissement et du développement de la pandémie. Et de poursuivre l’analyse, de proche en proche.

  • Quelle est la cause de la pandémie ?

La réponse est simple : un virus transmis par un animal. La mutation des microbes animaux en agents pathogènes pour l’homme n’est pas une nouveauté, elle a commencé avec la révolution néolithique lorsque l’espèce humaine inaugurait une économie de production avec l’agriculture et l’élevage. La rougeole et la tuberculose nous viennent des vaches, la coqueluche des cochons et la grippe des canards.
Cependant, en ce temps de crises à répétitions, cet argument peut laisser perplexe. En montrant du doigt l’animal sauvage, les gouvernements nous rassurent incidemment : « ouf, nous n’en sommes pas responsables ! Ça vient de la nature… comme l’orage ! » Ce sous-entendu omet une question centrale : pourquoi ces transferts d’une espèce à une autre se multiplient-ils à notre telle époque ?

  • La destruction des habitats naturels

Depuis 1940, des centaines de microbes pathogènes sont apparus ou réapparus dans des régions où, parfois, ils n’avaient jamais été observés auparavant : le VIH, Ebola en Afrique de l’Ouest, Zika sur le continent américain…
Depuis la crise de la grippe aviaire H5N1 en 2005, l’Agence américaine pour le développement international (USAID) a lancé et financer le projet Predict pour rechercher ces maladies. Le programme a collecté plus de 100 000 échantillons et trouvé près de 1 000 nouveaux virus, dont un nouveau virus Ebola.
Une étude, menée en 2017 sur ce dernier, a localisé l’apparition des chauves-souris dans les zones d’Afrique centrale et de l’Ouest qui ont subi récemment des déforestations.
L’Agence a ainsi observé que les foyers de départ des pandémies se multiplient là où l’activité humaine détruit les habitats naturels. La déforestation, l’urbanisation et l’industrialisation effrénées contraignent les animaux porteurs à se réfugier sur les arbres fruitiers des jardins et des fermes. Proximité qui rend possible leur ingestion. Les bouleversements écologiques prennent donc une part certaine dans le surgissement des pandémies. Et ils ne s’accompagnent pas uniquement de la dégradation des écosystèmes.

  • La destruction des politiques sociales

Une étude a analysé l’éruption du virus Ebola dans son contexte international. « En 2013, juste avant l’éruption d’Ebola, les trois pays ont été confrontés aux directives économiques du FMI, et aucun n’a pu augmenter ses dépenses sociales malgré des besoins pressants dans le domaine de la santé ».
Le Fonds monétaire international (FMI) est une institution internationale créée en 1945 pour « promouvoir la coopération monétaire internationale ». Depuis un trentaine d’années, l’octroi de prêt aux Etats passe par un ajustement structurel. Par une série de contraintes : ouverture du pays aux capitaux étrangers et au commerce international, libéralisation du marché du travail et réduction du poids de l’État, c’est-à-dire privatisation de nombreuses entreprises et baisse des politiques sociales (santé, éducation, agriculture…). Les marécages, les forêts, les terres arables deviennent des marchandises dans la logique du marché international et des spéculations boursières. Les écoles et les dispensaires voient leurs budgets fondre quand ils ne disparaissent pas.
Les contraintes imposées par FMI sont le reflet d’une politique devenue mondiale : la mondialisation libérale, parfois appelée aussi : mondialisation heureuse … la Communauté européenne en est un acteur exemplaire. En France, les pans de l’économie qui échappaient à la loi du marché sont livrés corps et biens à des sociétés privées : transports, éducation, santé, agriculture, services sociaux… Ces activités qui concrétisaient le Commun peuvent enfin enrichir les actionnaires. Cette idéologie a acquis une telle hégémonie qu’elle a séduit les partis politiques, de droite comme de gauche. Orban et Macron veulent tous les deux faire de la nation une start-up.
La Grèce est une victime exemplaire de cette politique. La France en découvre les conséquences dans le domaine de la santé : réductions des services sociaux et des budgets, fermeture des petits hôpitaux de province, manque de matériel et de lits , soignants au bord du burn-out, suicide au travail. Rendus volontairement exsangues, les services publics sont saturés. La pandémie trouve ainsi les conditions de son déploiement et de son aggravation.
Lorsque Macron avoue que le manque de masques n’est pas de sa faute, il dit partiellement vrai tout en cachant une vérité fondamentale. Il pense, certes, à ces prédécesseurs : Sarkozy, Hollande qui ont sabré les politiques sociales et les services publics avant lui… En cela il dit vrai, il n’est pas le seul responsable… mais il se garde bien de dire qu’il ne fait que radicaliser leur politique. Et à ce titre, il avoue, à son corps défendant, la responsabilité de ses contre-réformes dans le développement de la pandémie. La pandémie tue… parce que la politique lui en donne les moyens … en les supprimant !

  • Le virus du suicide

Cette politique tue en créant les conditions d’apparition des pandémies, elle tue aussi en détruisant les conditions de vie des populations et génère un autre virus, tout aussi mortel. Comme les richesses naturelles, l’être humain est devenu une marchandise. Un objet fabriqué pour le profit jusqu’à être réduit à un déchet. Mais nos élites ne parlent de marchandise, le terme est trop brutal, il lui préfère l’élément de langage plus consensuel : une ressource… cela fait plus naturel.
Le travail connait une véritable régression depuis une trentaine d’années : surveillance accrue, augmentation des cadences, néo-taylorisme, humiliation, précarité, flux tendu, absurdité, management du dégraissage, baisse des salaires, travailleurs pauvres… Pour le plus grand nombre, il devient un cri de souffrance dont les dépressions, les burn-out et les suicides au travail en sont les manifestations les plus dramatiques.
Comme la pandémie, le chômage structurel, engendré par la spéculation boursière, est devenu « un problème majeur de santé publique », alerte le Conseil économique, social et environnemental (Cese). Aujourd’hui, en France, « 10 000 à 14 000 décès par an sont imputables au chômage », dénonce le Cese, citant une étude de l’INSERM (2015). En 30 ans, c’est plus de 400 000 morts !
L’évolution du monde paysan dans lequel se rencontrent les dimensions écologiques, sociales et sanitaires connait une épidémie de suicides due à la politique agricole européenne. La France a perdu en 40 ans plus de trois millions d’agriculteurs. La multiplicité des fermes a disparu au profit de ces monstruosités que sont les grandes exploitations industrielles : la ferme des mille vaches. Les conditions de vie du bétail ne peuvent que favoriser le développement de virus et la dégradation des conditions de travail du personnel. L’Institut national de veille sanitaire (INVS) a mené une étude pour la prévention du suicide en mars 2011. Un agriculteur se suicide tous les deux jours. Près de 500 suicides ont été enregistrés sur trois années : 2007, 2008 et 2009. Selon l’institut, « la surmortalité par suicide a été de 28 % en 2008 et de 22 % en 2009 ». Les mêmes mécanismes provoquent les mêmes effets ailleurs. Suite aux contraintes imposées par le FMI, l’Inde a connu 150 000 suicides de petits paysans entre 1993 et 2012. Il n’y a pas que le coronavirus qui tue.
La marchandisation de la nature a fabriqué les conditions d’apparition des pandémies. La marchandisation de l’homme a favorisé leur développement et leur expansion… et le suicide. Mais le désastre ne s’arrête pas là. En détruisant l’environnement naturel et humain, le néolibéralisme, à la suite du capitalisme dont il est la figure actuelle, détruit les cultures, au sens anthropologique du terme. Les cadres de vie des peuples constitués par la langue, la technique, l’art, les organisations sociales…

  • Un séisme anthropologique : la destruction des habitats humains

Le drame n’est pas seulement écologique, sanitaire et social. L’existence humaine a besoin d’une histoire sensée, d’un cadre de vie familier et stable pour prendre corps et se perpétuer. Dans un environnement délétère qui promet le bonheur et détruit les existences, qui célèbre les Droits humains et abime l’homme et la nature, le monde devient absurde et invivable.
Crise trop profonde pour ne pas générer des drames d’une autre nature : les émeutes et des insurrections avec son lot de répression avec son cortège de victime. Et les suicides chez les jeunes générations.

  • Le temps des émeutes

9 millions de personnes meurent de faim toutes les années, un enfant meurt de faim toutes les 5 secondes. La pauvreté engendrée par cette politique pousse le plus grand nombre dans la misère et provoque des « printemps » lorsqu’ils se passent à l’étranger, des émeutes et des insurrections lorsqu’ils se passent en France ...

La suite à lire sur : https://blogs.mediapart.fr/jpsauzetorangefr/blog/090420/le-coronavirus-symptome-dun-systeme-criminel

Proposer un complément d'info

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message
  • Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

Publiez !

Comment publier sur Rebellyon.info?

Rebellyon.info n’est pas un collectif de rédaction, c’est un outil qui permet la publication d’articles que vous proposez. La proposition d’article se fait à travers l’interface privée du site. Quelques infos rapides pour comprendre comment être publié !
Si vous rencontrez le moindre problème, n’hésitez pas à nous le faire savoir
via le mail contact [at] rebellyon.info

Derniers articles de la thématique « Covid-19 » :

>L’industrie du complotisme

Vous en avez marre des conspirationnistes qui voient des lézards géants partout ? Et en même temps vous ne supportez plus la petite musique des médias qui traitent de "complotiste" chaque personne qui remet en question l’ordre établi ? Pour nourrir la réflexion des mouvements sociaux...

› Tous les articles "Covid-19"