C’est absolument scandaleux d’avoir détruit ce quartier populaire, d’avoir détruit ces immeubles. N’est-on pas en temps de guerre ?

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Un habitant du quartier a filmé la destruction de cet immeuble en 3 séquences :

« la fin d’Armstrong » le chrono est parti

« Tant d’appartements qui partent en poussière alors qu’il y a tant de gens qui cherchent à se loger... »

« la fin d’Armstrong » 2^e jour

« Pour les pouvoirs publics, c’est rapide d’abattre un immeuble, de mettre à bas 405 logements. Qui sont les casseurs ? »

« la fin d’Armstrong »

« Ils ont vidé le quartier de sa populace en mangeant les barres avec tous nos souvenirs d’enfance. »

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C’est scandaleux, pourquoi ?

 Cet immeuble avait des appartements très bien conçus, vastes, bien chauffés, avec un grand balcon, d’immenses placards et penderies, une cuisine pas petite, deux ascenseurs par allée, et un immense palier, sur lequel il était possible de mettre une table de ping-pong, voire même de faire la fête, où en tout cas on pouvait rencontrer ses voisins. De nombreux habitants relogés ailleurs sont mécontents de la disposition de leur nouvel appart et regrettent amèrement la rue Armstrong. Le comble c’est que le dernier habitant du 1-3, rue Louis Amrstrong était un jeune handicapé auquel l’OPAC du Rhône n’arrivait même pas à trouver de relogement adéquat... Quelle idée de détruire un tel immeuble !

 Le coeur du quartier Armstrong était uniquement piétonnier. C’était une très bonne chose pour les gamins qui jouaient en bas. En cassant tout, et même une partie de la barre Jean Cagne, on ouvre tout le quartier à reconstruire à la circulation automobile : ce sera pire qu’avant !

 De nombreuses personnes cherchent à se loger, et démolir autant de logements en parfait état est une insulte à toutes ces personnes (surtout qu’il n’y aurait plus eu de logements vacants avec le tram passant bientôt dans le quartier).

 Quel gâchis financier pour la collectivité. La Cour des comptes va-t-elle pouvoir se pencher sur un tel gaspillage de notre argent à chacun d’entre nous entre les démolitions inutiles et les reconstructions ?

 Et puis pour les pouvoirs publics le principal objectif, c’est la discrimination. Combien de familles seront effectivement relogées dans le quartier ? Un pourcentage infime. Toutes ces familles populaires, toutes ces personnes précaires n’ont qu’à aller au diable vauvert ! aux pelosses ! en tout cas le plus loin possible... Il n’y a qu’à voir à la Noranchal, à Fontaines sur Saône, où 290 logements ont été détruits, alors qu’il n’y a même pas le quota de logements sociaux sur cette commune : lorsque les relogés ont redemandé à réhabiter dans les futures constructions, selon l’assurance des pouvoirs publics, on leur a dit « Allez vous faire foutre ! Si on a démoli, c’est pour changer de population. » [1] Et oui, maintenant on veut une population qui a du fric !

Alors qu’à Toulouse par exemple, la première ligne de métro réalisée va de la Zup du Mirail jusqu’au centre-ville, comment se fait-il que sur le Grand Lyon la ligne A du métro s’arrête à Bonnevay sans se prolonger sur la Zup de Vaulx-en-Velin (elle est prolongée uniquement jusqu’à la Soie pour le nouveau quartier super bourgeois du "Carré de Soie" ; et le tram Léa ne passe pas par la Zup de Vaulx, trajet pourtant prévu) et que le métro D s’arrête dans un quartier peu peuplé près de la Gare de Vénissieux sans avoir été prolongée jusqu’à la Zup des Minguettes (le tram n’arrivant aux Minguettes qu’après la démolition). N’est-ce pas sur Lyon une véritable discrimination institutionnelle ? Les habitants des quartiers populaires sont considérés comme des moins que rien.

 Et puis pour les pouvoirs publics, l’autre objectif c’est de se venger.
Pour Gérard Cololomb en rasant le plateau de la Duchère n’y a-t-il pas de la vengeance vis à vis de tous ces jeunes de la Duchère qui ont hué son discours électoraliste inopportun le 22 décembre 1997 après la marche contre l’assassinat de Fabrice Fernandez au commissariat de Vaise ?

C’est très insidieux, mais dans ces quartiers il y a eu des révoltes. Alors il faut se venger en les cassant. Et pourtant il s’en est passé des choses admirables dans ces quartiers, mais on ne veut pas le reconnaitre. On préfère effacer en détruisant. Les Minguettes, c’est la grève de la faim de 1983 contre les abus policiers, c’est la "marche de l’égalité". Armstrong, c’est "Convergences" 1984 avec toutes les mobylettes, c’est un des premiers habitats groupés locatifs la même année. Et puis pour tous les habitants de ces immeubles, ce sont des milliers de souvenirs d’enfance, de jeunesse, des joies, des peines, des rencontres, des projets, des réalisations, comme la "Crèche Arc-en-Ciel", qui est toujours là dans le quartier avec le même projet pédagogique qu’au départ, comme la "régie de quartier"... Mais, ces gens qui habitent dans ces quartiers n’ont pas le droit d’avoir une mémoire.

On crie haro quand on rase un lieu de la Résistance, comme la Picharlerié dans les Cevennes, mais ici Armstrong, c’était aussi un lieu de résistances pour certains et pour tous ceux qui y ont habité, un lieu de mémoire qu’il n’y avait aucune raison de raser.

 Dans la même veine, voir le film sur des paroles d’un habitant des Minguettes, Michel Ganozzi :

Le carnet d’un arpenteur

 Voir également les articles du Popouri concernant les démolitions de la Duchère :
Gentrification à la Duchère
Le retour des technocrates !

 Voir aussi Résistances à l’opération « démolition - reconstruction » à Vaulx-en-Velin