Ni Nemesis, héritières directes de Génération Identitaire, ni le Printemps Républicain et ses satellites ne sont finalement parvenus à approcher réellement la manifestation. Longuement cantonnées aux abords de la rue du Temple, ces organisations n’ont pu finalement défiler dans un isolement complet que plusieurs heures après le départ du cortège, encadrées par un dispositif policier considérable.

Nous remercions à ce titre l’ensemble des organisations d’avoir tenu la ligne, d’avoir pris la responsabilité de retarder le départ de la marche et de s’être arrêtées et interposées à plusieurs reprises afin de bloquer Nemesis et Nous Vivrons. L’affirmation claire et unitaire du mouvement féministe, des organisations syndicales et de l’écrasante majorité des forces de gauche d’un refus de défiler avec des fascistes et des organisations racistes soutenant le génocide en Palestine constitue une victoire politique certaine, en dépit d’une répression qui ne nous a pas épargné·es.

Un membre de Tsedek ! participant au service d’ordre de la manifestation féministe à Orléans a ainsi été arrêté et placé en garde-à-vue pour le seul motif d’avoir écarté un activiste d’extrême-droite proche des sphères néo-nazies. Lui et un autre camarade ont fort heureusement été relâchés sans poursuites.

A Paris, la préfecture de police a pour sa part une nouvelle fois délibérément ordonné à des policiers armés d’attaquer physiquement une manifestation féministe. Un autre de nos militants, participant lui aussi au service d’ordre unitaire, a subi un traumatisme crânien après qu’un policier lui a assené un violent coup de tonfa derrière la tête, à quelques centimètres de sa nuque.

Évitable, cette violence est un choix politique, qui s’inscrit dans une dynamique plus large de criminalisation du féminisme, de l’antiracisme, de l’antifascisme, et de l’intégralité du mouvement social, dont participe aussi la tentative d’interdiction de la manifestation nocturne du 7 mars. La volonté étatique d’imposer par la force la participation de militant·es fascistes et réactionnaires à des organisations qui n’en veulent légitimement pas nous a tous·tes mis·es en danger. Il est évident que nous ne pouvons compter que sur nous-mêmes pour nous défendre. Faute d’une réponse unitaire, même nos propres manifestations ne nous appartiendront plus.

A Marseille, Nous Vivrons a également tenté piteusement d’imposer sa présence avant d’être repoussée par une mobilisation féministe et antifasciste déterminée. L’immense cortège rassemblé sur le Vieux-Port a ainsi exprimé sa volonté de ne pas transiger sur l’affirmation d’un féminisme intégrant un antiracisme politique conséquent. La manifestation s’est d’ailleurs achevée par la création d’une ZOF (zone d’occupation féministe) à la Joliette en face du consulat allemand (premier exportateur d’armes d’Europe vers Israël), de la BNP Paribas et du siège de l’armateur Maersk.

Ces actes d’autodéfense populaire ont largement été dénoncés par Nous Vivrons et ses relais politiques et médiatiques comme l’expression d’un antisémitisme de la gauche. A travers elles, ce serait en réalité la participation de “femmes juives” qui aurait été empêchée ce 8 mars. A l’encontre de ces mensonges, il est pourtant nécessaire de rappeler que le rejet du sionisme et de l’instrumentalisation du féminisme au profit d’un discours réactionnaire est celui d’une position politique, et non d’une identité. Rappelons ainsi que d’autres organisations juives de gauche, parfois sur des lignes diamétralement opposées concernant l’antiracisme, ont pu défiler sans le moindre problème.

Il n’y a rien d’antisémite à refuser la présence dans nos mobilisations de mouvements aussi islamophobes que le Printemps Républicain, ainsi que des soutiens inconditionnels de l’État d’Israël ou du génocide en cours à Gaza, tels que Caroline Yadan.

Il est à ce titre particulièrement regrettable que des organisations de gauche, certes de plus en plus isolées, se fassent le relais de ce mensonge.

Ce samedi aura marqué une étape importante dans la constitution d’un bloc antifasciste et interorganisationnel, où rien n’aura été cédé aux racistes. Nous tenons à cet égard à exprimer toute notre reconnaissance à Nous Toutes, ainsi qu’à la coordination rassemblant les organisations féministes, syndicales, antifascistes et anticolonialistes d’avoir œuvré en ce sens. Nous remercions aussi les personnes qui ont mis en jeu leur intégrité physique face à la violence d’État, et permis de déjouer le dispositif répressif.

Cette victoire politique ouvre des perspectives de front commun et doit nous amener à réfléchir à la suite. Nous espérons qu’elle contribuera à ouvrir les yeux de celles et ceux qui doutent encore de la détermination du pouvoir à nous écraser, et de sa responsabilité dans la fascisation en cours.