L’extrême droite est-elle en train de gagner l’hégémonie culturelle ?
Les pays dirigés par des partis d’extrême droite se multiplient : Brésil, États-Unis, Hongrie, Inde, Italie, Israël, Pologne, Turquie... Mais on ne peut se contenter de regarder ces victoires électorales pour visualiser l’avancée de l’extrême droite. Face à une remise en question du régime politique actuellement dominant, le néolibéralisme [1], c’est tout le bloc bourgeois dominant qui se rapproche de positions extrémistes sur l’immigration, la sécurité, etc.
Ainsi, Macron s’est fait élire grâce au barrage contre l’extrême droite alors qu’il s’est rapproché de cette dernière sur de nombreux sujets. Dans les exemples récents, on peut citer le passe-droit qu’il a donné à la réouverture du Puy-du-fou, parc d’attraction qui promeut une vision de l’Histoire particulièrement réactionnaire, ou son appel à Zemmour, idéologue nauséabond, pour l’assurer de son soutien.
Et ce n’est pas seulement à la tête de l’État que l’on se droitise fortement. Il est connu qu’une large partie de la police vote à l’extrême droite et l’actualité est remplie de violences policières racistes. Un article récent documente la prolifération des symboles extrémistes sur les uniformes ou dans les locaux de la police. La récente polémique médiatique sur les propos de Camélia Jordana illustre bien le déni médiatique et politique de ces réalités.
Pendant la crise du Covid-19, l’extrême droite institutionnelle et médiatique s’est rangée unanimenent derrière le populisme de Raoult et de l’hydroxychloroquine ; Valeurs Actuelles y a consacré une cinquantaine d’articles, Gilbert Collard a eu plus de 500 000 vues dans une vidéo complotiste à ce sujet et Marine Le Pen a défendu également ce médicament.
Pourtant, il est tout à fait possible que cette défense de Raoult ne soit pas retenue contre l’extrême droite : elle est loin d’être la seule à l’avoir fait et elle a suivi un large mouvement populaire extrêmement présent sur les réseaux sociaux, comme l’affirme une enquête de France Info. Mais est-ce que l’extrême droite s’est rangée derrière l’hydroxychloroquine par opportunisme politique ou a-t-elle suffisamment d’influence sur les réseaux sociaux pour avoir contribué à l’essor de ce mouvement ?
Car l’influence culturelle de l’extrême droite se ressent sur la toile : elle compte de nombreux médias assez consultés même s’il est difficile se fier aux statistiques d’audience sur Internet tant elles peuvent être manipulées. L’ouverture d’un nouveau média d’extrême droite comme celui d’Onfray, évolution logique de sa trajectoire de radicalisation, fait la une de nombreux journaux...
Mais l’extrême droite n’est pas seulement médiatique ou politique, elle s’appuie sur des militant·es de terrain organisé·es en groupes fascistes extrêmement dangereux : récemment, on peut parler de l’attaque de radio associative près de Saint-Étienne et d’un local associatif à Montpellier.
Si en France les derniers meurtres commis par l’extrême droite remontent à plusieurs années (Clément Méric en 2013 et Hervé Rybarczyk en 2011), de l’autre côté du Rhin, une recrudescence inquiétante des aggressions, attentats et assassinats (avec préméditation) commis par des néo-nazis contre des personnes d’origine extra-européenne ou des élu·es favorables aux migrant·es, a défrayé l’actualité ces derniers mois.
De nombreux groupes antifascistes font un travail de fond remarquable pour identifier ces militant·es, trouver leurs lieux de rassemblements, les liens qu’iels ont entre elleux. Un exemple récent : un groupe antifasciste lyonnais a publié récemment une enquête détaillée sur le nouveau local fasciste à Lyon, Terra Nostra, qui s’est ouvert sur les cendres du Bastion social, organisation fasciste interdite par l’État en 2019.
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