Le 27 novembre 1793, « le vertueux canut » Denis Monnet est guillotiné

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Révolte des canuts 6 compléments

Denis Monnet est un personnage capital de la lutte des canuts du XVIIIe siècle, et du mouvement ouvrier, il mérite d’être mieux connu, et pas seulement des Lyonnais... À Lyon, pas une seule place, pas une seule rue, pas une seule école ne porte son nom, ni de même dans d’autres localités de l’agglomération lyonnaise !
Cette exécution sommaire à Lyon le 27 novembre 1793, est dûe à l’erreur parisienne. Où mène le jacobinisme parisien, le centralisme, la rigueur soi-disant « révolutionnaire », le penser global sans connaître rien du local... sinon à de graves erreurs, à la fureur meurtrière, à Denis Monnet guillotiné !

Jugement sommaire de Denis Monnet

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« Le 7 frimaire de l’an 2, le tribunal de justice populaire séant à Ville-Affranchie, présents les citoyens Dorfeuille président, Cousin, Daumale et Baigue, juges, assistés de Gatier, greffier, dans le prétoire du tribunal de district de Ville-Affranchie, lieu ordinaire de ses séances publiques, faisant droit sur les conclusions de l’accusateur public, a condamné et condamne le dit Denis Monnet à la peine de mort, ordonne qu’il sera livré à l’exécuteur des jugements criminels, et conduit sur la place ordinaire des exécutions pour y avoir la tête tranchée. »

L’exécution de Denis Monnet, qui avait 43 ans, eut lieu le lendemain, le 27 novembre 1793, 8 frimaire de l’an 2, « cette malheureuse année de la République française », comme le disait François-Joseph Lange, un des précurseurs du vrai socialisme, qui fut aussi exécuté 12 jours avant Denis Monnet.

De Paris, Robespierre, Hébert, Collot d’Herbois, Fouché... avaient missionné Dorfeuille à Lyon (Ville-Affranchie), mais ce Dorfeuille ne connaissait rien de ce qui se passait réellement dans cette ville. Il n’a pas compris, ainsi que d’ailleurs d’autres Parisiens, qu’à Lyon c’était toutes les prémices du mouvement ouvrier qui étaient en train de naître. Comment a-t-il pu accuser Denis Monnet d’être contre-révolutionnaire ?

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quai « pierre scize » à l’époque de Denis Monnet

« Une célébrité parmi les tisseurs à cause de ses services » disait de lui Pierre Charnier, le fondateur du Mutuellisme, qui était installé dans le même quartier que Denis Monnet, à Bourgneuf, rue Peyrollerie, aujourd’hui quai pierre scize.

Jean Jaurès furieux de l’imbécilité primaire et de ce qu’avait fait ce soi-disant révolutionnaire en condamnant Denis Monnet à la guillotine, n’y allait pas par quatre chemins. Il parle de « Malentendu sinistre », de « maniaque de destruction », de « fureurs meurtrières », « qu’il ne sait rien de Lyon, de son passé glorieux, et triste, de ses révoltes sociales... Comment peut-il oublier que les ouvriers lyonnais avaient formulé récemment un nouveau tarif des salaires avec des considérants d’une haute portée sociale ? »

Et Denis Monnet y était pour beaucoup dans toute cette lutte pour "le tarif".

Dix-sept mois après l’exécution de Denis Monnet, c’est au tour de celui qui l’avait fait guillotiner. En effet, le 15 floréal de l’an 3 (4 mai 1795), lors de ce qu’on a appelé la terreur blanche, plusieurs milliers de "mathevons" envahissent les prisons de la ville de Lyon et massacrent 99 Jacobins détenus, dont le comédien Dorfeuille, ex-président du Tribunal révolutionnaire.

La lutte de Denis Monnet avec les ouvriers lyonnais

- Pour se rendre compte dans les luttes des canuts de l’action formidable de Denis Monnet se reporter à l’article :

Le 5 mai 1790, les canuts décident « de se gouverner par eux-mêmes » ! ... C’est à Lyon avec Denis Monnet que le syndicalisme est fondé

« La classe des maîtres-ouvriers lyonnais est, par l’esprit de résistance et d’organisation, ou même par la netteté de certaines formules sociales, en avance sur la classe ouvrière du 18e siècle. » C’est ainsi que Jean Jaurès entrevoit la lutte des canuts, qui se sont soulevés dès 1744, puis (...)

5 mai 2023

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  • Le 28 novembre 2014 à 09:54, par vince

    article très intéressant, une petite erreur à corriger dans le texte (et ce n’est pas la peine peut-être de publier ce commentaire) :

    « Il est vrai que deux ans plus tard, à la chute de Robespierre, le 15 floréal de l’an 3 (4 mai 1795) »

    - La chute de Robespierre c’est plutôt en 1794, quelques mois seulement après l’exécution et toujours en l’an II

    - et plutôt en thermidor (la « réaction thermidorienne » comme je l’avais lu qq part) c’est-à-dire en juillet

    et sur les « 2 ans plus tard » je n’ai pas bien compris d’où ça commençait et de quoi il s’agissait...

    fraternellement
    v

  • Le 3 décembre 2009 à 20:45, par Le sale communiste

    Je ne vois pas ce qu’il y a d’étonnant : la révolution française était une révolution bourgeoise, menée par des bourgeois. Progressiste par rapport à l’Ancien Régime, mais réactionnaire par rapport aux premières manifestations du mouvement ouvrier comme Denis Monnet - ou Babeuf.
    Ils n’étaient pas très nombreux... Les entreprises étaient encore familiales et les ouvriers avaient tendance à se sentir « de la famille » du patron (d’ailleurs les canuts n’étaient pas des ouvriers - avec des « salaires » - mais des micro-sous-traitants exploités, des petits tisserands familiaux avec des « tarifs » (fixés par la chambre de commerce, tenue par les maîtres d’ouvrage, les soyeux).

    Il faut en finir avec ce culte de « l’an I », c’est le mal de l’extrême-gauche française ! C’était une autre époque, d’autres classes, d’autres contradictions : autant invoquer Spartacus tant qu’on y est !

  • Le 29 novembre 2009 à 14:25

    Jaurès nait plus de 60 ans après la mort de Monnet... Je ne vois pas en quoi ses commentaires nous éclairent sur quoi que ce soit.

  • Le 27 novembre 2008 à 01:00

    Une correction a été effectuée. Merci de votre remarque.

  • Le 29 novembre 2006 à 18:40, par Almanach de Myrelingue

    Merci pour ces précisions.

    Nous allons essayer de trouver aux archives le motif de la condamnation à mort de Denis Monnet.

    En ce qui concerne les citations de Jaurès, l’article ne met pas en cause Robespierre, mais celui qui a prononcé la condamnation à mort.

    Nous allons faire en sorte que le passage soit plus clair là-dessus et corriger l’autre passage, selon vos suggestions et après relecture des sources.

  • Le 29 novembre 2006 à 13:45, par Anne

    Il serait utile d’avoir les conclusions de l’accusateur public contre Denis Monnet, afin de savoir sur quels motifs il fut condamné à mort.

    L’interprétation que fait l’article des citations de Jean Jaurès est fausse. Toute l’argumentation de Jaurès vise à rendre Collot d’Herbois et les hébertistes (Ronsin, Vincent) seuls responsables de la répression sanglante à Lyon, en dédouanant les autres membres du Comité de salut public. Quant à l’expression « bande parisienne de Robespierre », elle n’a aucun sens : Robespierre n’était proche ni de Fouché ni de Hébert, et la politique du Robespierriste Couthon à Lyon est sans commune mesure avec celle qu’y mena Collot d’Herbois. Collot fut d’ailleurs rappelé à Paris par le Comité de salut public de Robespierre pour rendre compte des excès de la répression à Lyon. Et Fouché, accusé des mêmes faits, et qui craignait pour sa vie, fut l’un des principaux artisans de l’exécution de Robespierre le 10 thermidor...

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