Chers mecs cis hétéro : nous ne viendrons plus

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A la suite de l’agression d’une copine le dimanche 13 mai, quelques mots pour redire que les luttes féministes ne sont plus une option. Dernière sommation pour être prises au sérieux.

Nous ne viendrons plus à vos soirées, à vos manifs, à vos fêtes, à vos spectacles, à vos réunions, à vos assemblées générales, à vos boulots, à vos lectures, à vos dîners. Si on revient, on sera armées, les dents serrées et les poings sortis. On ne fera pas ça de gaîté de cœur : vous nous forcez la main. On a compris maintenant que tendre l’autre joue ne nous menait nulle part, nous ne faisons que prendre la mesure de la situation. Et la situation est la suivante : nous sommes les vaincues. Nous ne sommes pas fortes mais dos au mur. Nous n’avons plus d’autre choix que de mordre.
La situation est simple : vous êtes pour l’instant les vainqueurs de la guerre en cours, la guerre du genre. Le sexisme et la misogynie ne sont pas des mots que nous jetons en l’air pour vous faire peur ou pour vous pomper l’air en fin de journée après quelques verres. Le sexisme et la misogynie, c’est ce qui nous mutile, c’est ce qui nous tue, c’est ce qui nous viole. C’est une guerre qui se fait avec des armes bien plus meurtrières que des bombes parce qu’elle commence dans nos propres corps que nous sommes les premières à apprendre à haïr. Parce que nous sommes les premières à nous excuser, à baisser la tête et à consoler ceux qui nous frappent.
On nous a appris à demander pardon d’être des vaincues.

Ce dimanche on apprend qu’une copine a été victime de viol lors d’une fête. L’épouvantable, c’est la banalité de cet événement. Statistiquement, si ce n’était pas notre copine ce soir-là, cela aurait été le sort d’une autre personne. Statistiquement, lorsque ces mots sont en train d’être écrits, il y a une victime de plus à déplorer, à ajouter à la liste des autres de cette journée.
Les corps brisés s’entassent dans le silence. Solennellement, nous accumulons une haine qui ne s’évapore même plus lorsque nos corps brûlent dans la danse et les cris. Nous avons été patientes : on attend depuis des siècles la gueule couverte de bleus. Alors, un crachat à vos faces quand vous dites que nous sommes belles.
Car en réalité nous sommes laides ! Laides des coups, nous avons toutes le nez en morceaux, la mâchoire pétée et des coquards en guise de regard. Toutes, nous sommes amochées et aucun compliment sur notre maquillage ou les courbes de notre cul n’y changera rien. Un corps de vaincue, ce n’est pas beau à voir.

Nous ne viendrons plus parce que nous avons compris que nous sommes vos ennemies. Nous vous traiterons donc comme tel. On rendra tous les coups, on ne laissera parler personne avant nous, on hurlera plus fort, on sera injustes, on sera aveugles, on fera peur. Pas par gaîté de cœur : simplement pour survivre. Si nous venons, si nous dialoguons, ce ne sera qu’après la preuve nette et indubitable de votre traîtrise auprès des vôtres. Si vous apprenez à vous taire, peut-être qu’on vous écoutera. Si vous vous organisez pour nous accompagner sur nos fronts, peut-être que nous vous dirons quoi faire. Si vous écrivez des poésies qui ne nous insultent pas, peut-être que nous les lirons. Si vous faites des chansons qui célèbrent nos victoires, peut-être qu’on les écoutera. Si vous vous acharnez à mettre en place des lieux et des fêtes qui nous accueillent, peut-être qu’on viendra. Même après tout cela, nous resterons méfiantes car ce sont nos vies et nos corps que nous mettons en jeu.

Entendez ceci comme un avertissement proféré d’une voix grave et tremblante de colère.
Entendez ceci
Vous n’aurez pas la paix.

Nous ne réclamons rien. Nous n’attendons rien. Même brisées et épuisées, nous continuerons à nous battre, avec un sourire en coin. Nous sourions parce que nous savons que, malgré les apparences, vous êtes fragiles. Sinon vous ne feriez pas preuve d’un tel acharnement à mater nos corps. Et nous serons belles le jour où le dernier complice des patriarcats sera pendu avec les tripes du dernier flic.

Chers hommes cis et hétéros
Les amochées vous saluent

Haine Rage Amour

Retours sur une soirée en squat et appel à témoignages

En fait on s’est raté, malgré nous, mais aussi parce qu’on minimise plein de questions, parce qu’on n’a pas envie de se dire que des trucs horribles vont arriver, parce qu’on a envie d’y croire, mais surement aussi parce qu’on a la trouille, et puis qu’on n’est pas assez, qu’on doit (...)

29 mai 2018

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