Contre la nouvelle loi sécuritaire et l’état d’urgence permanent : manifestation le 12 mars

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Manifestation samedi 12 mars à 14h30 place des Terreaux à l’initiative du collectif Lyonnais contre l’état d’urgence, dans le cadre d’une journée nationale

Le 1er Mars, J.J Urvoas (ministre de la justice) a présenté au parlement la nouvelle loi sécuritaire dite "de lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leurs financements". Cette loi vise à instaurer un état d’urgence permanent et vient s’ajouter à la modification de la Constitution. Elle va renforcer les moyens de contrôle et d’espionnage de la population par l’état et ses nervis, en s’asseyant sur les droits et libertés individuels. En transférant une grande partie des prérogatives de la justice à l’autorité administrative et policière, et en faisant glisser le peu qui en reste des mains des juges d’instructions à celles des procureurs qui ne sont pas indépendants, elle bafouera le peu qui reste de l’état de droit et de la garantie démocratique de séparation des pouvoirs.

Tout ça pour quoi ? L’état d’urgence a montré son inefficacité contre le terrorisme : depuis 1986, une vingtaine de lois antiterroristes ont été votées, elles n’ont pas empêché que des attentats soient commis en France, par contre elles ont multiplié les mesures d’exception et les régimes particuliers… Les autorités ont procédé à 3242 perquisitions entre le 14 novembre et le 29 janvier, et seulement 4 ont abouti à l’ouverture d’une enquête pénale liée au terrorisme (qui auraient de toute façon vu le jour par les voies classiques). Par contre, il a montré son efficacité dans la répression des mouvements sociaux et politiques et dans l’accentuation de la ségrégation et de la stigmatisation raciste.

Pour se justifier, l’état et les postillonneurs de service martèlent que nous sommes en guerre contre des barbares à l’étranger et sur le territoire français. Ce discours repose sur deux enfumages : car le terrorisme est moins lié à la guerre en Syrie et ailleurs qu’au néo-colonialisme pratiqué en France et en Europe. Les terroristes se servent de la guerre pour justifier leurs actes, mais même sans guerre, ils les commettraient sous d’autres prétextes et peut-être d’autres formes. Quant à l’état d’urgence permanent, il n’est qu’hypocritement lié aux attentats. Les partisans d’une société sous contrôle ont saisi l’aubaine pour mettre en place en quelques mois ce qui leur aurait pris des années. Ils ont toujours su trouver de bonnes raisons pour installer leur appareil sécuritaire, cette loi n’étant que la dernière née d’une longue série. Cette exploitation cynique de la violence devrait provoquer l’indignation et le rejet, mais la peur fait tout accepter.

Gouverner par la peur

Comme toujours, on nous ressort cette vielle rengaine comme quoi il faudrait choisir entre liberté et sécurité. Les gouvernements successifs prétendent avoir trouvé la réponse en affirmant que « la sécurité est la première des liberté ». Sauf que la répression, le flicage et la surveillance généralisés ne peuvent pas empêcher le terrorisme.
Le travail tue plus que le terrorisme (accidents, suicides, maladies...), mais ça ne provoque pas le même sentiment de peur, car on nous persuade que c’est la fatalité, que ces morts sont inhérentes à la vie, alors qu’elles sont pour la plupart dues à l’avidité des capitalistes. Loin de combattre ces crimes, les gouvernements font passer des lois qui accentuent l’insécurité et la dangerosité du travail !
Le capitalisme crée volontairement un climat anxiogène , qui amène la soumission, et permet de contrôler la population par ses peurs et ses angoisses.
Peur du chômage qui fait accepter la surexploitation au travail.
Peur de ne pas être conforme et de ne pas correspondre aux normes sociales du moment, cette peur qui crée le consumérisme de produits dont le besoin a été créer artificiellement.
Peur du terrorisme et de l’insécurité qui fait accepter un renoncement à nos libertés individuelles et collectives et un renoncement à penser par nous même. Et qui fait accepter le racisme institutionnel (états, patrons, administrations, police, médias...) et la violence qui en découle.
Peur de l’autre, de « l’étranger », du « différent », qui menacerait la pureté d’une identité mythique et fantasmée, et qui fait accepter une dérive vers une société autoritaire imposant des normes et où toute contestation deviendra impossible .

Vers une société de contrôle et de répression

Depuis le début de l’état d’urgence, nombre de manifestations de mal-logé-es, de réfugié-es, pro-palestinienes, d’écologistes, de salarié-es, ont été interdites. Des militant-es ont été poursuivi-es pour avoir bravé cette interdiction et risquent de la prison (la manifestation contre la COP21 a été interdite et réprimée violemment, débouchant sur plusieurs centaines d’arrestations et 317 gardes à vue). D’autres ont été assigné-es à résidence arbitrairement. Cette nouvelle loi s’inscrit dans une volonté globale de criminaliser et museler toute forme de contestation. Cette volonté qui s’est déjà affirmée en dehors de l’état d’urgence notamment avec la condamnation à 9 mois de prison ferme pour les 8 de Goodyear.
Parallèlement, la violence d’état s’est abattue sur les quartiers populaires et les musulman-e-s ou supposé-es tels . La police a multiplié les actes racistes, perquisitions violentes sans lien avec le terrorisme, humiliations...Avec cette loi, la violence deviendra pérenne et légale.

Sur les terroristes

Selon Axel Honneth (sociologue), la vie en société et le rapport à soi que ça implique dépendent de trois formes de reconnaissance :
La reconnaissance affective qui donne à l’individu confiance en soi et lui permet de participer à la vie publique.
La reconnaissance juridique et politique. Dans une société, c’est en étant reconnu comme un sujet universel, porteur de droit et de devoir, qu’un individu acquiert le respect de soi et des autres.
La reconnaissance sociale. Elle permet de se rapporter positivement à ses qualités particulières, à ses capacités concrètes, et à certaines valeurs décrivant son identité culturelle. Cette reconnaissance est indispensable à l’estime de soi.
« Si l’une de ces trois reconnaissances fait défaut, l’offense sera vécue comme une atteinte menaçant de ruiner l’identité de l’individu tout entier ».
Où est la reconnaissance juridique et politique quand la police pratique les contrôles aux faciès et est coutumière des actes racistes ? Quand la justice condamne généralement plus sévèrement certaines catégories de la population ?
Où est la reconnaissance sociale quand les employeurs pratiquent la ségrégation à l’embauche, et bloquent les perspectives d’avenir ? Quand l’obtention d’un logement est soumise à des critères racistes ? Quand l’identité culturelle de toute une partie de la population est méprisée et stigmatisée. Quand on ne peut pas être citoyen-ne français-e à part entière et en même temps rester respectueu-se de ses racines ?
Où est la reconnaissance affective quand on nous met dans la tête comme seul rêve de faire de l’argent et comme seules valeurs l’égoïsme et la réussite individuelle ? Quand la fraternité est ridiculisée et l’autre vu comme un objet qu’il faut utiliser pour réussir ou comme un concurrent qu’il faut éliminer ?
La société prive donc des personnes de leurs estime, respect et confiance en elles. Ce qui ne peut que conduire à la catastrophe, la violence répondant à la violence.

- Tant qu’il y aura une culture dominante considérée comme la seule valable et que les autres seront méprisées et écrasées
- Tant que des gens seront considérés comme impossible à intégrer dans la société parce que trop différents
- Tant que des gens, français depuis plusieurs générations, seront toujours considérés comme des étrangers et que la politique de la France sera « les étrangers il faut les soumettre ou c’est eux qui nous soumettront »
- Tant qu’on reléguera toute une partie de la population dans des territoires qui ressemblent de plus en plus à des ghettos encadrés par une police militarisée
- Tant qu’on dépossédera des gens de leur identité et de leur histoire
- Tant que la société créera un vide existentiel que les gadgets high- tech ne combleront jamais

Il y aura toujours des gens prêts à ce faire embrigader par toutes sortes de fanatiques totalitaristes.

- Tant que des gens ressentiront l’humiliation d’être considérés comme des citoyens de seconde zone
- Tant que les brimades racistes feront partie de leur quotidien
- Tant que la société considérera que la réussite financière et la gloire sont les seuls buts valables dans la vie alors que l’écrasante majorité n’y aura jamais droit
- Tant que ceux qui nous dirigent et qui décident pour nous nous voleront notre dignité
- Tant qu’une partie de la population sera privée de perspective d’avenir, qu’elle n’aura pas de futur donc pas d’espoir et rien à perdre
- Tant que la colère contre cette société se transformera en rage aveugle
Il y aura des gens prêts à mourir en faisant un maximum de dégâts avant. Et ça n’est pas un état d’urgence permanent qui pourra y changer quoi que ce soit. Au contraire ça ne peut que jeter de l’huile sur le feu.

Petit à petit, on nous entraîne vers une société policière où régnera la violence au quotidien (violence d’état, violence terroriste, violence au travail...). Exclusion, racisme, enfermements communautaristes seront la norme. Une société où toute contestation sera devenue impossible et où il n’y aura plus d’espace pour exister que celui qu’on voudra bien nous concéder.

Pour nos libertés, pour une société fraternelle, ne cédons pas à la peur, rejetons l’état d’urgence et les lois sécuritaires !

http://www.nousnecederonspas.org/
http://www.stopetatdurgence.org

Groupes associés à l'article

Batbad

  • http://www.batbad.eklablog.com
  • batbad1@orange.fr
samedi 12 mars 2016

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