Refus de prélèvement ADN : les 5 de Roanne relaxés

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Le 5 novembre 2013, les 5 de Roanne étaient jugés pour « refus de prélèvement ADN ».

Participant au mouvement contre la réforme des retraites de 2010, ces 5 syndicalistes de la CGT avaient graffité, sur des murs roannais, des « casse toi pov’ con » à l’adresse d’un notable local.

C’est pour cela qu’ils avaient été traînés en justice, et condamnés en première instance, avec inscription au volet B2 du casier judiciaire, ce qui aurait engendré pour ces fonctionnaires la révocation d’office, si ce verdict était devenu définitif.
Ils ont donc fait appel, et au palais de justice des 24 colonnes, fin 2012, ont ainsi été finalement dispensés de peine, et de toute inscription au casier judiciaire.

Mais en mai 2013, ils reçoivent une convocation pour prélèvement d’ADN : ils avaient été « seulement » dispensés de peine, l’institution judiciaire roannaise se pensait donc en droit de prélever leurs ADN, la loi semblait le lui permettre...
S’étant rendus à leur convocation pour expliquer qu’ils refusaient ce prélèvement d’ADN car ils étaient « des militants, pas des criminels », ils ont subi, le lendemain à l’aube, une interpellation à leurs domiciles respectifs suivie d’une garde à vue. Et été inculpés pour ce refus de prélèvement, bien sûr...

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Le fichage ADN : contrôle social et injure envers les militant.e.s

On peut remarquer que le fichage des ADN, au départ, a été demandé par des associations de parents d’enfants victimes de violences sexuelles et de meurtres, et obtenu suite à l’affaire Dutroux : il visait les auteurs de délits et crimes sexuels (sur mineurs essentiellement). On pense ici au tortionnaire Dutroux, assassin des enfants Julie, Mélissa, An, Eefje, tortionnaire dont on connaît les techniques de démolition de ces jeunes personnes par les deux survivantes : Sabine et Laëtitia. On pense aux violeurs d’enfants qui attendent, terrés à l’ombre d’un bosquet, et qui laisseront un cadavre derrière eux.
On pense à ce qu’on voit à la télé...
On ne pense pas à la majorité des violeurs d’enfants : ceux qui œuvrent au sein de leur propre famille, sur leurs propres enfants ou sur des enfants liés à eux par d’autres liens d’interconnaissance, familiale ou amicale, avec des adultes parents de ces enfants. L’intérêt du fichage ADN apparaîtrait, en effet, peut-être plus limité déjà, dans ces cas moins médiatisés, et pourtant beaucoup plus fréquents...
On ne pense pas à José Bové, ni aux 5 de Roanne, ni à tant d’autres camarades anonymes, qui ont du subir l’humiliation d’être mis dans ce fichier : vous savez, celui des criminels sexuels ?!
In fine, les crimes sexuels font toujours autant de victimes dans l’impunité, le fichage ADN s’est, lui, focalisé sur d’autres cibles en pratique... : nous.
« Militants, pas voyous », « militants, pas criminels », prend ici tout son sens.
Le fichage ADN prend en effet, du fait de cette histoire et de cette genèse, en plus du côté « contrôle social et fichage », un aspect insultant pour les camarades qui le subissent.

Un rassemblement de soutien réussi, une relaxe obtenue !

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Au cours de ce procès du 5 novembre 2013 pour refus de prélèvement ADN, procès marqué par la présence de milliers de cégétistes en soutien dans la ville de Roanne (20000 selon la CGT, 8000 selon la police), le procureur avait requis un mois de prison avec sursis, ajoutant ne pas comprendre que l’on puisse refuser de se faire prélever de l’ADN, tant les effets du fichage sont positifs : par exemple, expliqua-t-il, c’est grâce à son ADN présent au fichier, que l’on a pu identifier un squelette récemment, ce qui n’aurait pas été possible sans ce fichage génétique...

Le délibéré était mis au 17 décembre 2013.

Résultat : les 5 de Roanne sont relaxés, et les ébauches de jurisprudences obtenues sont intéressantes, puisqu’il a été jugé qu’une personne non condamnée ne pouvait subir un prélèvement d’ADN (les 5 de Roanne avaient été dispensés de peine, donc certes reconnus coupables, mais...non condamnés). Leurs gardes à vue ont également été reconnues illégales.
Le Parquet a déclaré attendre de recevoir le jugement détaillé pour décider ou non de faire appel...

Un soutien massif, mais pour qui et comment ? Questionner les oublis syndicaux...

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Si l’on peut se féliciter d’une telle issue, à laquelle la mobilisation massive autour des palais de justice a apporté une contribution probablement très importante, on peut toutefois questionner les modalités de soutien d’aujourd’hui : soutien par les syndicats de ceux qu’ils reconnaissent comme des membres importants du syndicat, mais pas, matériellement, de tou.te.s les inculpé.e.s des mouvements d’octobre 2010.
Relire les compte-rendus d’audiences lyonnaises d’octobre 2010, puis de début 2011 pour les appels, remet ainsi, très vite, les pendules à l’heure : pour 5 camarades relaxés au bout de plusieurs années, combien ont été condamné.e.s dans l’ombre ?

Jeune, précaire, lycéen.ne, quel soutien ?

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En octobre 2010, des jeunes, la plupart non syndiqué.e.s car trop souvent le syndicalisme ne sait plus accueillir les précaires en tant que camarades de lutte, mais uniquement en tant que personnes pouvant nécessiter un soutien juridique et de conseil individuel, ni inclure ceux qui sont encore élèves, ont été interpellé.e.s, puis traîné.e.s dans la boue par leurs juges.
Ce, dans un contexte où des jeunes mobilisé.e.s, c’était forcément « de la racaille qui vient pour tout casser ».

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La « racaille » a écopé de jusqu’à un an de prison ferme, pour des jets de projectiles présumés sur des policiers durant le mouvement contre la réforme des retraites. Les jets de projectiles étaient largement engendrés par l’attitude des policiers eux-mêmes, qui n’hésitaient pas à poursuivre et harceler de leur présence et de leurs armements les jeunes manifestant.e.s, de façon ciblée.
Un agent de la SNCF, qui, alors que nous marchions sur les rails le 21 octobre 2010 matin, évoquait devant moi « les jeunes casseurs », s’est vu fort surpris par ma réponse lorsque, me montrant une pile de tuiles au bord des rails, il déclara : « nous, si jamais les CRS veulent venir sur les rails, qui sont du domaine privé d’ailleurs donc ils n’ont pas à y venir, on saura les accueillir ». Je lui dis « ben pour des pierres bien plus petites que ça, des jeunes ont pris des mois ferme... ».
Le cheminot blêmit, d’un coup, réalisant que les casseurs, c’étaient des gens comme lui : des gens qui savent accueillir dignement les CRS sur leur territoire professionnel.

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Mais ce blêmissement n’a pas eu pour effet de déclencher l’élan de solidarité qui, pour ces jeunes autant que pour les 5 de Roanne, aurait été nécessaire.
Fondamentalement, ce système militant où de fait, l’on ne défend que les membres de son groupe, et pas les autres, a pour conséquence directe ce soutien très différencié selon « qui » est à soutenir. Selon la place du/de la « soutenu.e » dans les notabilités militantes, et selon sa « mise de départ » sur la bonne « chapelle » militante : celle qui saura le mieux le défendre, il.elle sera plus ou moins soutenu.e.
Autant dire que la place de ces jeunes dans ces « notabilités militantes » est nulle.
Eux.elles, personne n’y a pensé en syndicaliste, on dirait...

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Un projet de loi d’amnistie qui reproduisait cet oubli

Au point que même la loi d’amnistie, finalement mise aux oubliettes par un gouvernement rose pâle, mais dont la CGT re-parle dans son texte mis en lien ci-dessous, n’aurait pas permis l’amnistie de ces jeunes : en effet, le projet présenté évoquait « les syndicalistes », ainsi que les travailleurs acteurs de mouvements sociaux.
Mais pas les non travailleurs.euses de ces mouvements...pas ces jeunes qui sont celles.ceux qui, en réalité, ont le plus morflé, dans le silence ambiant, parsemé seulement de temps en temps de récits, par bribes, de ce qui leur était infligé, tels ces compte rendus d’audience parus sur rebellyon.

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On peut rêver du jour où le soutien aux 5 de Roanne sera inter-syndical, et aussi du jour où les jeunes, et notamment ceux/celles issu.e.s des filières de lycées pros et techniques, retrouveront toute leur place dans le syndicalisme, pour y apporter avec nous, au propre comme au figuré, la révolution, ou du moins un syndicalisme qui mérite le nom de révolutionnaire, et n’hésite pas à se faire porteur d’une aspiration claire à l’égalité économique et sociale entre tou.te.s.
Et qu’ils.elles bénéficieront ce jour-là, en retour, de la même solidarité confédérale de la CGT, mais aussi des autres centrales, que nos 5 camarades roannais.e.s,

Et on peut œuvrer à le réaliser, ce rêve, si on refuse d’oublier ce que devrait être une justice digne de ce nom, et si on construit de la solidarité qui dépasse les frontières de chaque organisation...parce que quand on participe d’un même mouvement social, c’est aussi qu’on est d’un même monde militant, qu’on se définisse soi-même comme militant.e, ou non.
Et c’est cela qui devrait nous conduire à dire, et mettre en œuvre, la maxime : "tou.te.s pour un.e, un.e pour tou.te.s".
Parce que la solidarité sans limites ni frontières nous rend tou.te.s plus fort.e.s face à la répression.

Zora la Rousse, racaille 2 France et folle alliée

La jus­­tice est « le res­­pect, spon­­ta­­né­­ment éprouvé et réci­­pro­­que­­ment garanti, de la dignité humaine, en quel­­que per­­sonne et dans quel­­que cir­­cons­­tance qu’elle se trouve com­­pro­­mise, et à quel­­que risque que nous expose sa défense. »
« Le droit est pour chacun la faculté d’exiger des autres, le res­­pect de la dignité humaine dans sa per­­sonne ; le devoir, l’obli­­ga­­tion pour chacun de res­­pec­­ter cette dignité en autrui »
(Pierre-Joseph Proudhon, in « De la Justice dans la Révolution et dans l’Eglise »).

Rétrospective, principalement à travers les articles déjà parus sur rebellyon, des étapes de l’histoire des 5 de Roanne :

- Le 5 novembre 2013 : procès des 5 de Roanne pour refus de prélèvement d’ADN, 20000 personnes présentes en soutien selon la CGT

- Les 5 de Roanne se rendent à leur convocation et expliquent pourquoi ils refusent le prélèvement d’ADN : résultat, le lendemain à l’aube, la police roannaise vient les chercher brutalement à domicile et les met en garde à vue

- Convoqués en mai 2013 pour prélèvement d’ADN

- Dispensés de peine en appel pénal en 2012

- Compte rendu et mise en perspective critique du rassemblement lors du procès en appel des 5 de Roanne du 15 octobre 2012

- L’appel au rassemblement du 15 octobre 2012 en soutien aux 5 de Roanne

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