Répression syndicale et colonialisme en Kanaky

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En Kanaky (Nouvelle-Calédonie) toujours colonisée par la France de Sarkozy, on emprisonne les syndicalistes et le leader de l’USTKE, d’origine lyonnaise.
Chômage, répression syndicale et policière, mépris, sont le quotidien du peuple Kanak.
Cette article retrace les origines des conflits qui agitent la Kanaky depuis de longs mois dans l’indifférence générale.

Gérard Jodar

Gérard Jodar est le président actuel de l’Union Syndicale des Travailleurs Kanaks et des Exploités (USTKE), syndicat indépendantiste de Kanaky [1]. Il a 57 ans ; né à Givors (Grand Lyon-Sud), ce fils d’ouvrier et petit-fils de communiste qui a grandi à Vénissieux, a débarqué sur l’île de Nouvelle-Calédonie en 1971 avec un billet « tour du monde ». Il y est resté.

Cela fait 38 ans. Et au lieu de rejoindre dans l’état d’esprit comme la plupart des arrivants français la communauté blanche coloniale de Nouméa, il s’est intégré progressivement à la vie des Kanaks. Travaillant au départ dans l’hôtellerie, puis au sein de la compagnie aérienne UTA, il a été encouragé par ses collègues kanaks à défendre les opprimés par l’État colonial français. C’est en 1978, qu’il lance une grève en fondant un nouveau syndicat autonome, STAR. Puis, déjà reconnu dans l’ile kanake, il est aux côtés de Louis Kotra Uregeï pour fonder en 1981 l’USTKE (Union Syndicale des Travailleurs Kanaks et des Exploités). Après 19 ans de combat ensemble, il prend la présidence de ce syndicat en l’an 2000 lorsque Uregeï, se rendant compte de l’effritement du FLNKS [2], décide de s’occuper du Parti Travailliste, en créant cette branche politique du syndicat USTKE.

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Sarkozy veut la peau de l’USTKE - Aggravation des peines requises en appel

La justice française est allé très fort le 29 juin 2009 puisqu’elle a cru bon de condamner le président de l’USTKE, Gérard Jodar, à un an de prison ferme avec mandat de dépôt, ainsi que cinq autres responsables syndicaux de 12 mois à 3 mois de prison ferme, pour « entrave à la circulation d’un aéronef » alors qu’ils essayaient de se protéger des violences des policiers qui les chargeaient brutalement en se réfugiant dans des avions en stationnement. Les 28 syndicalistes, à ce moment-là, organisaient une conférence de presse à l’aéroport Magenta de Nouméa pour exiger la réintégration d’une employée licenciée de la compagnie aérienne Air Cal, alors qu’après une grève lancée par l’USTKE, un accord était intervenu mais avait du mal à être finalisé.

Lors de l’assaut violent des forces de l’ordre, ils ont été contraints de se réfugier à vingt-huit dans deux avions dont les portes étaient ouvertes pour se protéger et attendre la fin des affrontements. Les 28 syndicalistes sont tous passés devant le tribunal, et pour des faits strictement identiques, les condamnations vont de l’amende à douze mois ferme pour le responsable de la fédération Bâtiment Travaux Publics et pour le président du syndicat, en passant par de la prison avec sursis. Ces décisions sont totalement discriminatoires, voire surréalistes. Il n’y a eu aucune instruction malgré la requête des avocats, et ce fut un procès exclusivement à charge.

Le mardi 25 août 2009, lors du procès à la cour d’appel de Nouméa des 26 syndicalistes de l’USTKE condamnés en première instance, le procureur a requis des peines encore plus lourdes, demandant 15 mois de prison ferme contre le président du syndicat Gérard Jodar.
Le tribunal a mis le jugement en délibéré pour le 15 septembre tout en prononçant le maintien en détention des six militants incarcérés à la prison de Camp Est depuis le 29 juin.

Ils font partie des très rares syndicalistes à être emprisonnés en France.
Déjà, le lundi 10 août 2009, le juge d’application des peines du tribunal de grande instance de Nouméa a rejeté la demande d’aménagement de peine formulée par les avocats de l’USTKE. On veut faire taire Gérard Jodar, museler les responsables de ce syndicat.

Conditions de détention indignes proches du bagne colonial

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Entrée du Centre Pénitencier « le Camp Est »

Depuis plus de trois mois les six responsables de l’USTKE font des constats qui sont terribles en croupissant dans les cellules surpeuplées du Camp Est, la seule prison de Kanaky, qui est en fait un camp pénitentiaire.

Ils sont cinq ou six dans les cellules crasseuses de 11 m2. La prison, prévue pour 190 détenus, en compte 417 le 16 août 2009. La nourriture est loin de correspondre aux besoins et aux normes des droits de l’homme. Les installations sanitaires ne permettent pas de satisfaire les besoins naturels dans des conditions de décence et de propreté et le maintien de l’hygiène corporelle n’est pas assuré au Camp Est. D’ailleurs, les conditions de détention « ne garantissant pas le respect de la dignité humaine », le Tribunal Administratif a ordonné une enquête auprès d’un expert qui doit rendre son rapport fin octobre 2009.

Les jeunes Kanaks représentent 97 % des détenus de la prison du Camp Est. Il n’y a aucune structure de formation en interne pour permettre la réinsertion de tous ces jeunes détenus. La Kanaky est toujours une colonie et nous sommes aujourd’hui en ce qui concerne les conditions de détention pas très loin de l’époque du bagne.

D’autre part, Gérard Jodar est privé des visites de son épouse au parloir depuis qu’il a transmis au journal Libération des réponses écrites à une interview. Cela nous permet d’avoir des informations sur ces conditions de détention, sur lesquelles nous nous appuyons, mais l’administration pénitentiaire a trop peur de la révélation de la vérité. C’est une décision arbitraire de la direction du centre, décision vraiment digne d’une dictature.

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Grèves et refus de négocier de la part du patron de l’entreprise aérienne Air Cal

Dans le dernier conflit avec la compagnie aérienne locale Air Calédonie qui assure le transport intérieur (Grande Terre / Iles Loyauté), si les négociations avaient débuté dès le départ de la grève, et non plusieurs mois après, le conflit aurait été réglé de suite, et rien de ce qui s’est produit n’aurait eu lieu. Mais l’État français, le patronat et la droite locale ne rêvent que d’une chose, la disparition de l’USTKE, et font traîner les choses à dessein.

L’USTKE avait lancé un mot d’ordre de grève générale de 24 heures le jeudi 28 mai, suite au licenciement abusif d’une employée d’Air Cal, pour dénoncer le refus du dialogue social au sein de l’entreprise et la remise en cause des libertés syndicales. Ce conflit perdurait depuis 2 mois et demi faute de dialogue avec la direction d’Air Cal qui refuse catégoriquement les propositions avancées par le syndicat sans jamais négocier. Cette journée de mobilisation générale qui se voulait pacifique et non violente avait pour but, par une présence massive des militants à l’aérodrome de Magenta, de ramener la direction d’Air Cal à la table des négociations et de trouver une issue dans un conflit qui n’avait que trop duré au détriment des usagers de la compagnie.

A plusieurs reprises, les syndicalistes grévistes présents devant l’entreprise se sont faits délogés par les forces de l’ordre alors qu’il n’y avait aucune entrave au service public et que tout se faisait dans le respect de la libre circulation des usagers.

A l’issue de ce cette forte mobilisation dans le cadre de la grève générale de 24 heures lancée par le Bureau confédéral, le vendredi 29 mai, l’USTKE, dénonçant l’absence de dialogue social dans un conflit qui s’éternise, la répression systématique par les forces de l’ordre des mouvements de grève, ainsi que la criminalisation de l’action syndicale et de l’exercice du droit de grève, fixe un ultimatum au 5 juin 2009 pour que soit réglé le conflit Air Cal. Faute de quoi, l’USTKE appelle toutes les structures de son organisation à une grève générale illimitée sur l’ensemble du Pays.

C’est ainsi, comme le protocole d’accord mettant fin à un conflit motivé par le licenciement abusif d’une employée de la compagnie aérienne Air Cal n’était toujours pas signé par la compagnie pour pouvoir rentrer en application, l’USTKE a lancé après le 5 juin un mot d’ordre de grève générale. Cette organisation syndicale réclamait avec insistance que le protocole négocié sous l’égide de la direction du travail entre les avocats de la compagnie et les représentant du syndicat soit signé afin de mettre fin au conflit.

Mais le président du conseil d’administration de cette compagnie, Mr Nidoish Naisseline, a mis son veto à la signature de l’accord par la direction d’Air Cal et porte une grosse responsabilité dans la réouverture du conflit social.

Cependant, ni Madame Marie-Luce Penchard, secrétaire d’état à l’Outre-mer, ni Monsieur Kouchner, ministre des Affaires étrangères, lors de leur passage en Kanaky, n’ont pris des initiatives pour trouver une solution au conflit.

La Kanaky meurtrie mais résistante

Ce nouveau conflit se déroule dans un climat social dégradé par l’amplification des inégalités sociales et du chômage galopant pour les jeunes kanaks et wallisiens. Nombre d’entre eux se sont joints d’ailleurs aux manifestations et barrages organisés par l’USTKE.

Les promesses de l’État colonial n’ont, pour l’essentiel, pas été tenues. La formation, qui devait permettre l’accession des Kanaks à tous les postes de la société, a abouti au fait qu’aucun n’est avocat, juge ou procureur, et qu’un seul est médecin ! Des dizaines de jeunes Kanaks ont suivi des formations en métropole. À leur retour sur le territoire, ils n’ont généralement pas accès aux postes correspondant à leurs compétences, ces postes étant donnés prioritairement aux blancs. Ils sont obligés de s’exiler alors dans les pays voisins ou en France.

Le développement d’usines de transformation du nickel par des multinationales se fait en excluant largement les populations locales kanakes, alors que des métropolitains, venus profiter de l’aubaine, sont embauchés massivement. En effet, la colonisation de peuplement des métropolitains a augmenté de 20% ces dix dernières années.

Les langues kanakes n’ont toujours aucune place dans l’enseignement sur place, contrairement aux promesses de l’accord de 1988, et la culture kanake, très liée à l’environnement, l’Humain tirant sa force de la terre et des éléments naturels, est traitée avec grand mépris : par exemple le protocole de Kyoto n’est pas applicable en Kanaky, une vingtaine de pesticides interdits en France pour leur dangerosité y sont autorisés et utilisés, la protection du littoral kanak n’a pas de base juridique...

Malgré tous ces obstacles, les Kanaks continuent de résister ardemment. Meurtris mais forts de l’expérience de la colonisation, les Kanaks n’ont pas cessé d’inventer depuis mille ans des solutions aux problèmes soulevés par les mutations, ce qui leur a permis d’échapper à leur disparition et au contraire de s’imposer au rang des peuples avec lesquels il faut compter.
C’est l’une des civilisations les plus originales et les plus toniques que la France ait eues à connaître.

USTKE : le syndicat indépendantiste et anticapitaliste des exploités kanaks

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L’Union syndicale des travailleurs kanaks et des exploités (USTKE) a été créée en 1981 par Louis Kotra Uregeï. Dans ses statuts, l’USTKE affirme son engagement “pour le droit à l’autodétermination du peuple kanak et pour le libre exercice de sa souveraineté nationale”, ainsi que “pour la suppression de l’exploitation capitaliste”.

Historiquement proche de la CGT, elle s’est rapprochée par la suite de la Confédération Paysanne et des milieux altermondialistes.

Le combat de l’USTKE se tient surtout au sein des 13 % d’entreprises sur le sol kanak employant des salariés, notamment les sociétés d’exploitation du nickel, de transport ou d’hôtellerie...

Ce syndicat a été l’une des composantes fondatrices du FLNKS de Jean-Marie Tjibaou en 1984. L’USTKE a d’ailleurs participé à la signature des accords de Matignon avec Michel Roccard le 26 juin 1988. Puis, après l’assassinat de Jean-Marie Tjibaou et de Yeiwéné Yeiwéné le 4 mai 1989, considérant que le FLNKS s’embourgeoisait et était devenu trop mou, l’USTKE décide de se détacher totalement du FLNKS le 27 juillet 1989.

L’USTKE s’est doté en 2000 d’une alternative politique : le parti Travailliste, dirigé par Louis Kotra Uregei, ancien président-fondateur de l’USTKE. Le parti Travailliste dispose depuis mai 2009, de trois élus au Congrès territorial. Son discours plus radical trouve écho auprès d’une jeunesse kanake qui n’a guère profité des retombées de la croissance économique avec la construction de deux usines de traitement de nickel. En effet, pour ces chantiers on a préféré l’afflux d’une importante main-d’œuvre extérieure.

L’industrialisation accélérée du territoire kanak fait peser des menaces importantes sur l’environnement que l’USTKE ne cesse de dénoncer. Il a trouvé des appuis auprès du mouvement autochtone Rheebu Nuu et d’élus de l’Union Calédonienne qui veulent reprendre la direction du FLNKS.

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Mobilisations importantes et émeutes de jeunes kanaks début août

Après les condamnations des syndicalistes de l’USTKE et l’emprisonnement de Jodar et de cinq militants le 29 juin, s’ensuivent dix jours d’affrontements entre forces de l’ordre et salariés de l’USTKE qui exigent leur libération. Alors que leur procès en appel est fixé au 25 août, un "Collectif pour la défense des droits et des libertés et la défense des syndicalistes emprisonnés" se monte en rassemblant : USTKE - SLUA - UC - PT - UCR - RHEBUU NUU - SEUK (étudiants) – AJQ (Associations jeunes des quartiers). Ce Collectif appelle à une « grande journée de mobilisation » le samedi 22 août.

Mais l’injustice est telle qu’on n’attend pas ce jour-là pour manifester sa colère. Un climat de tensions importantes s’installe sur les îles kanakes. En grève générale, pour protester contre l’enlisement d’un conflit à la compagnie aérienne Air Cal, le syndicat USTKE organise chaque jour des barrages routiers et des piquets de grève aux portes des entreprises, dégagés violemment par les policiers à coups de grenades lacrymogènes, auxquelles répondent occasionnellement jets de pierre et de projectiles.

Voyant des syndicalistes se faire taper dessus par les forces de l’ordre, alors les jeunes kanaks se mobilisent aux côtés de l’USTKE. Les jeunes ne croient plus à la politique, n’ont plus confiance dans les institutions et n’ont aucun débouché professionnel. Lorsqu’on n’a plus d’espoir dans l’avenir, on réagit par réflexe. En venant d’eux-mêmes se battre aux côtés des syndicalistes de l’USTKE, les jeunes estiment que leur situation peut être mieux prise en compte pour avoir enfin une place dans le pays. Des heurts importants mêlant des jeunes et des syndicalistes se sont produits début août avec la police, amenant de nombreuses arrestations. Le mercredi 5 août à la tribu de Saint-Louis, dans la banlieue de Nouméa, alors que la gendarmerie voulait dégager des barrages de pneus enflammés dressés par des jeunes et des syndicalistes, il y a eu des échanges de tirs blessant 2 gendarmes et 4 manifestants.

« Nous dénonçons les excès de zèle, les débordements gratuits et les violences policières contre les syndicalistes et tous ceux qui manifestent.
 » a tenu à lancer à la foule un membre du bureau confédéral de l’USTKE lors de la marche du samedi 22 août. Cette manifestation organisée par le "Collectif pour la défense des droits et des libertés et la défense des syndicalistes emprisonnés" a rassemblé 3.000 personnes à Nouméa. Dans une ambiance bon enfant favorisée par un soleil éclatant, portant des banderoles et drapeaux aux couleurs de l’USTKE, les manifestants ont dénoncé un "acharnement" et un "procès à charge", réclamant la "libération immédiate" de Jodar et de ses camarades. Après avoir dénoncé la collusion "entre l’État colonial et la justice", Louis Kotra Uregeï, président du Parti Travailliste et président d’honneur de l’USTKE, a esquissé, visiblement très détendu, quelques pas de danse devant les grilles du haut commissariat de la République. Il y a eu aussi ailleurs d’autres rassemblements de soutien.

« En Kanaky, nous sommes toujours dans une colonie de la France ! »

L’embastillement de Jodar est apparu comme le point d’orgue d’une politique de “retour à l’autoritarisme de l’État” lancée en 2007 après l’élection de Sarkozy. D’ailleurs c’était clair à l’arrivée du nouveau haut-commissaire de la République, Yves Dassonville, en novembre 2007 : « Un de mes premiers chantiers est (…), si besoin est, de faire preuve de fermeté ». Il n’y a jamais eu en Kanaky un haut-commissaire donner des instructions aussi brutales. Il traite les Kanaks de voyous, car il ne sait nullement tenir compte de la culture du pays et c’est grave pour un personnage de la sorte.

La secrétaire d’État à l’Outre-Mer Marie-Luce Penchard, lorsqu’elle est venue pour la première fois en Kanaky le 5 août dernier « pense qu’on va trouver une solution dans 24 heures » : ...elle n’a pas pris la mesure des choses. Elle est restée dans le superficiel aux côtés de ses collègues du Medef et de la droite locale.

Le Medef local n’a qu’un objectif : celui d’accentuer les profits pour une riche minorité sous l’habillage du développement économique. De nombreux patrons gagnent beaucoup d’argent en Kanaky mais placent cet argent ailleurs. Le Medef local est fondamentalement anti-indépendantiste et n’arrête pas de dire qu’ici c’est la France, alors que le SMIC est plus bas et les avantages sociaux inférieurs pour les salariés.

Créer son entreprise en son nom propre est l’histoire d’une journée en Kanaky. Pas d’Urssaf, des charges sociales avantageuses, un barème d’impôt sur le revenu et un système de "double défiscalisation" très favorable. C’est ainsi que nombreux sont les artisans, maçons, agents de conseil, qui souvent venus de métropole et des îles Wallis-et-Futuna, pour monter leur entreprise uni-personnelle en profitant de ces avantages, colonisent la pays. C’est ainsi que deviennent majoritaires ceux qui soutiennent Sarkozy, même si celui-ci ne tient pas à faire le voyage jusque là : « Le terrain est miné » dit-il.
Cela en dit long sur le premier personnage de l’État.

Le peuple kanak, ceux qui ont été reconnus comme victimes de l’histoire vont devenir minoritaires si rien n’est fait. D’autant, que la perspective du référendum d’autodétermination, prévu entre 2014 et 2018, approche à grands pas. Depuis plus de dix ans, déferle une vague de plus en plus importante d’immigration en provenance de France. Quand on connaît la crise économique que traverse la France et la facilité avec laquelle ceux qui débarquent arrivent à trouver du travail au détriment de ceux qui sont citoyens du pays, on ne peut qu’être choqué. Dans les tribus ou les quartiers populaires et les squats de Nouméa, la capitale est appelée "Ville Blanche" parce qu’il n’y a plus que des Européens. Il faut stopper cette immigration qui n’a comme but que le fric. Ceux-ci, pour la plupart, veulent que surtout rien ne change, car ils vivent richement et égoïstement.

« Le gouvernement français devrait respecter intégralement les dispositions de l’accord de Nouméa de 1998 qui doit conduire à une vraie décolonisation. L’USTKE a été la seule organisation syndicale à avoir signé les accords de Matignon en 1988. Ces accords ont été dans un premier temps un "cessez-le-feu" qui mettait un terme aux événements de 1984-1988. Ces accords, suivis par ceux de Nouméa, doivent conduire à la reconquête de la souveraineté, ce qui devrait permettre aux Kanaks de gérer le pays en toute responsabilité, mais avec un préalable très important, celui de restituer au peuple kanak sa place légitime de peuple autochtone, seul peuple actuel colonisé, au centre du nouveau pays. », selon Gérard Jodar.

Mais effectivement nous en sommes loin. C’est plutôt tout le contraire qui est mis en œuvre. Nous sommes revenus au temps des colonies. On en vient même à payer maintenant les gens pour aller manifester. En effet, lors de la "manif blanche" du 12 août, les administrations publiques, par l’intermédiaire de certains élus, main dans la main avec le patronat local ont incité ensemble à manifester contre l’USTKE, tout en payant la journée non travaillée. Les patrons, qui passent une bonne partie de leur temps à larmoyer devant la situation de l’économie locale, n’ont pas pour autant hésité à libérer et à inciter leurs salariés à aller manifester, sans retenue salariale.

Le rassemblement pacifique de responsables syndicaux et politiques, auquel s’était joint des élus municipaux, représentants du peuple, et des responsables d’associations a été réprimé sans ménagement par les forces de l’ordre et le GIPN, malgré une absence totale de provocation, à l’occasion de la visite de la Secrétaire d’État. Les Kanaks sont-ils des citoyens de seconde zone ? Leurs représentants n’ont-ils pas les mêmes droits et les mêmes prérogatives que leurs homologues métropolitains ?

Nous sommes en Kanaky dans une énorme discrimination fortement ressentie. Dans quel pays, en dehors de quelques républiques bananières décide-t-on, à l’occasion d’une manifestation syndicale, de condamner à de la prison ferme des leaders et des militants syndicaux pour avoir exercé leur droit de manifester, ce qui pourtant est un droit légitime et légal ? Met-on en France tous les militants syndicaux en prison lorsqu’ils exercent leur droit de grève et paralysent les transports ?

« La Kanaky a payé le lourd tribut du sang pour permettre à nos futures générations de vivre dans un pays libre et où les droits de tous soient reconnus à part égale, et dans la dignité retrouvée.

Faudra-t-il refuser de nous asseoir à la table de nos bourreaux et de nos tortionnaires, tant que l’État ne reviendra pas à une logique d’égalité de traitement et de respect des engagements pris ? » écrit encore Jodar.

La seule réponse du gouvernement français est l’acharnement dans la répression

Une fois de plus, la réponse de l’État est la répression policière avec attaque violente de la part des forces de l’ordre, gendarmes mobiles et GIPN contre les militants, la criminalisation du droit syndical et de l’exercice du droit de grève. Les militants sont victimes de l’acharnement de l’État au travers de l’action des forces de l’ordre et du parquet de Nouméa. Cela fait plusieurs fois depuis début 2008 que les syndicalistes sont chargés par plusieurs centaines de policiers et gardes mobiles, alors que leurs mobilisations, dans le cadre de grèves générales licites, étaient pacifiques.

Le harcèlement policier et judiciaire des responsables syndicaux, les perquisitions et les interpellations au petit matin à leur domicile, les attaques contre les piquets de grève et les condamnations par la justice coloniale à des mois de prison ferme et à des centaines de milliers d’euros d’amende sont le signe du raidissement de l’État colonial.

Face à la volonté systématique de l’État de réprimer toute forme de contestation, de manifestation et même d’expression dans cette colonie, Sarkozy met en place la militarisation du territoire en bafouant complètement le respect des libertés syndicales, associatives et politiques.

L’USTKE dénonce “la répression policière sans limite” de ses actions, ainsi que les propos et l’attitude du délégué du gouvernement qui qualifie l’action syndicale de banditisme et l’USTKE de preneur d’otages ! Ce même État qui fait du dialogue social son credo dans les instances locales et qui, dans la réalité, pratique la répression policière. Depuis le début du conflit, trois mois maintenant, il n’a fait preuve d’aucune initiative dans la recherche de solution acceptable, se complaisant dans la manipulation de l’opinion publique pour justifier son action et contribuer ainsi au pourrissement du conflit.

Cette répression abusive et aveugle non seulement indigne et injuste, enracine une justice de classe. Alors même que les délinquants de la haute finance, les abuseurs de biens sociaux, les patrons voyous sont traités avec égard, les salariés, les syndicalistes et les victimes de la casse sociale sont jetés sans ménagement dans des geôles ancestrales.

En prononçant le maintien en détention à l’encontre des six militants dans l’attente du délibéré, la Cour alimente sciemment une stratégie de tension à l’endroit de ceux qui défendent les intérêts de leur peuple.
Depuis quelque temps déjà, la politique sarkozyste tente de contrôler et de réprimer fortement le grave mécontentement social. De nombreux militants engagés contre toutes sortes d’inégalités sociales sont régulièrement traînés sur les bancs de la justice ou victimes de violences policières.

Le Haut-Commissaire, en poste actuellement à Nouméa, ne cesse de jeter de l’huile sur le feu et pratique l’escalade de la répression policière, alimentant ainsi un climat de violence et une répression accrue. Ainsi, onze syndicalistes ont été arrêtés le 4 août suite aux manifestations et barrages du lundi 3 août. Vendredi 7 août, ce sont sept personnes de 20 à 47 ans qui ont été condamnées en comparution immédiate à des peines d’un à six mois de prison ferme pour avoir participé à des affrontements avec les forces de l’ordre le 5 août à proximité du quartier de Montravel.

L’intervention de la gendarmerie, et surtout du GIPN à chaque conflit social, l’arrestation de syndicalistes, jugés et condamnés, la stigmatisation de l’USTKE renforcent le statut colonial de Kanaky. Comme on le voit, l’État français se refuse à rompre avec l’arrogance coloniale qui est la sienne depuis des siècles, et qui le déshonore aux yeux de l’opinion internationale.

Contre toutes les manœuvres de criminalisation de l’action syndicale en Kanaky, exigeons la libération immédiate des syndicalistes et des jeunes emprisonnés lors des actions de l’USTKE

Non à la répression !

Solidarité avec les militants de l’USTKE et les jeunes Kanaks condamnés !

Notes

[1Véritable nom de la Nouvelle-Calédonie.

[2Front de libération nationale kanak et socialiste. Voir sa définition sur Wikipédia

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