On nous nomme AVS (pour Auxiliaire de Vie Scolaire) ou EVS (pour Emplois Vie Scolaire). Les premiers dépendent directement de l’Inspection académique, les seconds relèvent d’un contrat de droit privé.
Notre tâche est de remplir les « trous » de l’éducation nationale.
Nous pallions au manque de personnel qualifié pour accueillir les enfants handicapés à l’école. Nous servons de secrétaires aux directeurs d’écoles pour éviter de leur décharger plus de temps pour les tâches administratives. Ainsi ils conservent du temps pour une classe, et c’est trois quarts de poste ou un demi poste d’enseignant économisé. On s’occupe des BCD des écoles en lieu et place de documentalistes. Nous sommes souvent le surveillant en plus qui court réceptionner les élèves quand un collègue est absent...
Nos contrats sont précaires. On coûte moins cher.
Il existe environ 1500 EVS dans le Rhône.
Il s’agit de contrat de droit privé aidé de type CAE ( Contrat d’Accompagnement dans l’Emploi) ou CAV (Contrat d’AVenir).
Ces contrats ont été inventés pour faire baisser le taux de chômage d’abord chez les jeunes puis les personnes qui sont aux minimas sociaux.
Ce sont des CDD de 6 mois minimum et de un an maximum, renouvelables une seule fois.
Il existe deux types de contrat : le premier pour 20h, l’autre pour 26h. La rémunération est égale au SMIC, soit 603 euros net par mois pour 20h. Autant dire que vivre avec 603 euros par mois c’est difficile, impossible pour une personne seule ou qui a des enfants.
Nombre d’entre nous cumulons donc d’autres emplois pour joindre les deux bouts. Il n’est pas rare qu’un EVS, en plus de ses heures hebdomadaires payées par l’État, surveille des cantines et des études en fin de journée, celles-ci payé par les mairies. Certain.es travaillent donc de 8h30 à 18h sans discontinuité, soit plus de 9 h par jour d’école, pour arriver à cumuler environ 1000 euros par mois.
Ceux d’entre nous qui sont affectés aux taches administrative font un travail de secrétariat indispensable, sans être reconnus, pour un salaire dérisoire.
Les autres, qui travaillent avec des enfants handicapés (physique et/ou psychique), ne reçoivent aucune formation spécifique, ceci au détriment de l’enfant.
Il n’existe pas de prime de déplacement, pas de réduction TCL, ni de ticket restaurant, ni de prime REP (Réseaux Education Prioritaire) pour celles et ceux d’entres nous qui travaillent dans les quartiers. Pas non plus de primes de licenciement. Pas de formation ni de validation des acquis possible. En cas d’absence justifiée par certificat médical c’est trois jours de salaires entièrement retenus (carence), puis 50% de notre salaire par jour d’absence. Il vaut mieux ne pas tomber malade !
En plus des conditions de travail déplorable qu’induit ce type de contrat, il se trouve que régulièrement nos droits sont bafoués.
Un exemple un peu technique, mais qui touche des centaines d’EVS dans le Rhône : le temps de travail effectué par semaine.
Prenons l’exemple d’un EVS en CAE(1) qui a signé un contrat de 20 heures hebdomadaires. Il relève du contrat de droit privé, donc pas plus de 5 semaines de congé payé. Arguant de ce fait, nos employeurs (des principaux de collèges publics) nous ont demandé de récupérer les heures non faites pendant le temps des vacances scolaire. Avec ce qu’ils appellent la « modulation » et l’annualisation des heures, ils faisaient le calcul suivant :
52 semaines moins les 5 semaines de congés est égal à 47 semaines.
Puis ils ont multipliés 47 par 20 pour arriver à 940 heures annuelles.
Puis ils ont divisé 940 heures par 36 semaines (qui correspondent aux semaines scolaires) pour arriver à 26 heures par semaine.
Donc depuis deux ans on a demandé à des EVS de « récupérer » des heures de travails et donc de travailler 26 heures par semaine payées seulement... 20 heures !
Sauf que c’est illégal !
Il est spécifié dans les contrat CAE que le maximum horaire par semaine est seulement de 20 heures et que s’il y a « modulation » des heures de travail effectuées en une semaine, cette modulation doit être régie par un accord de branche. Or, il n’y a aucun accord de branche pour nos statuts avec l’Éducation nationale (2). Donc nous ne devons que 20 heures par semaine et pas une de plus ; vacances scolaires ou non. Nous ne sommes pas responsables du chômage « technique » qu’impliquent les vacances scolaires.
On en arrive à des cas insensés où, dans une même école, des EVS qui ont fait valoir leurs droits travaillent 20 heures payées 20 heures et d’autres 22 heures, 24 heures, voire 26 heures payées 20 heures ! C’est tout simplement scandaleux.
C’est état de fait tient pûrement à la précarité. Cette précarité rend difficile toute « projection » de plus de 6 mois. Nous sommes « atomisé.es » dans des écoles et il est très difficile d’avoir des infos sur nos droits. Il est encore plus difficile de nous organiser pour créer un rapport de force en notre faveur.
Pourtant la colère monte, et on assiste peut-être à un timide réveil de la part des précaires de l’éducation nationale. On parle doucement de faire quelques rassemblements pour faire pression sur les différentes institutions qui nous exploitent afin de conserver notre travail et en améliorer significativement les conditions et les salaires.
D’autant que si nos conditions sont déplorables on risque tout simplement de ne plus travailler du tout. En effet, pour l’instant personne n’est en mesure de savoir si nos contrats seront renouvelés au moins une fois. Après le 30 juin 2008 c’est le trou noir.
On sait au niveau du projet de lois de finances prévu pour l’année prochaine qu’une enveloppe correspondant à 30 000 emplois à temps partiel est prévue pour l’ensemble du territoire. Ce chiffre est à comparer aux 50 000 postes existants. Même si ce budget est voté (ce qui est loin d’être sûr vu les coupes sombres prévues dans la fonction publique), près de 20 000 d’entre nous resteront sur le carreau.
Il est temps que les précaires, soutenu.es par les statutaires, se réveillent.
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