Le contrat de mission

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Michel de Virville, secrétaire général
du groupe Renault (chargé de la
fermeture de l’usine de Vilvorde en
1997), conseiller des gouvernements
de gauche comme de droite depuis les
années 80, a remis, jeudi 15 janvier, au
ministre des affaires sociales, François
Fillon, un rapport intitulé « Pour un Code
du travail plus efficace ». Ce rapport est issu
de 6 mois de travail mené par un groupe
d’expert. Il s’agit de 50 propositions de nouvelles
méthodes et de modifications du code
du travail pour « le projet de loi de mobilisation
pour l’emploi » que le gouvernement
doit présenter après les régionales au
Parlement. Parmi ces propositions, un
« CDD longue durée » appelé « contrat de
mission » ou « contrat de projet ». Souhaité
depuis des années par le MEDEF
et
défendu par le Syntec (patronat de l’informatique)
et le Centre des jeunes dirigeants,
ce contrat viserait le secteur de l’informatique
et de la recherche. En réalité il est
« ouvert à des cadres ou des personnels qualifiés,
notamment des experts » sans précision
de secteur. Ces nouveaux et nouvelles
salariéEs seront recrutéEs pour un « projet
déterminé » sans durée fixée à l’avance.
Aucune durée maximale n’est indiquée,
mais le ministère parle d’une durée de
5 ans.
La loi devra fixer la durée minimale,
l’indemnité de fin de mission, la nature des
activités, les catégories de salariéEs
concernéEs, et les mesures de reclassement
en fin de contrat... Enfin les conditions de
son utilisation, selon les secteurs d’activité,
seraient définies par un accord de branche.

Depuis, ce projet a déclenché un tollé général
chez les syndicats et la gauche (pourtant
elle-même créatrice de nombreux contrats
précaires dont le contrat emploi jeune de
5 ans). Après avoir reçu les partenaires
sociaux, François Fillon déclare le 23 janvier
« je ne sais pas si on le retiendra ». Pourtant
le 2 mars Jean-Pierre Raffarin annonce que
le gouvernement s’opposera « avec fermeté »
à la « généralisation » du contrat de mission
situé entre le CDD et le CDI. Le contrat de
mission est donc encore à l’ordre du jour.
Ne nous leurrons pas il s’agit seulement
d’une stratégie pour éviter le rapport de
force avec les travailleurs et travailleuses, et
nous pouvons compter sur les directions
syndicales pour aider le gouvernement dans
cette démarche.

D’ailleurs, STMicroelectronics a anticipé le
projet de loi sur l’emploi. Depuis juillet dernier,
les salariéEs peuvent signer un « CDI »
de quatre ans, suite a un accord d’entreprise,
que seule la CGT a refusé de signer. La direction
insolente affirme : « De toute façon, une
loi va être votée. ST aura été précurseur ».
Dans ces conditions comment peut-on
croire que le gouvernement a l’intention de
s’opposer à quoi que ce soit ?

Pourquoi s’opposer au contrat de mission

Malgré toutes les déclarations que peut
faire le gouvernement, ce contrat est évidemment
synonyme d’augmentation de la
précarité
 : augmentation de la durée maximum
légale des CDD (actuellement de
18 mois pour les contrats d’apprentissage),
flexibilité, retour au travail à la tâche, et surtout
changement de la fonction du CDD.
Initialement conçu comme une exception
(le CDI étant la règle générale), le CDD jusqu’à
maintenant ne pouvait être, selon le
Code du travail, utilisé que dans certaines
conditions (remplacement, surcroît d’activité,
CDD d’usage...).

Soit-disant pour créer des emplois, ce
contrat va augmenter le chômage.
En effet
les périodes de mission alterneront avec des
périodes de chômage (qui sont en plus de
moins en moins indemnisés). Périodes pendant
lesquelles les travailleurs et travailleuses
devront se former à leur frais en fonction de
la demande des patronNEs. Ce contrat facilite
le licenciement.
Aucune durée n’étant
fixée, le patron ou la patronne pourra
licencier quand il veut, en décidant que la
mission est terminée.

500 000 personnes sont concernées actuellement.
Mais si le projet est adopté, très vite
il va être étendu à l’ensemble des salariés.
En effet avec le contrat de mission le
CDD devient la règle, et le patron (ou la
patronne) n’est plus obligé de se justifier
pour l’utiliser. Comme les salariéEs se
retrouvent complètement à la merci des patronNEs,
ces dernierEs ont intérêt à l’imposer.
Donc petit à petit le CDI (même s’il est
loin d’être parfait, il reste le seul contrat
garant de stabilité) va disparaître. Ernest-Antoine
Seillière approuve le contrat de mission
à condition cependant que celui-ci ne
soit pas « limité aux emplois les plus qualifiés
 ». On sait à quoi s’attendre !

Au-delà du contrat de travail c’est le rapport
salariéEs / patronNEs qui va être modifié,
et bien entendu pas en faveur des
salariéEs. En transformant chaque salariéE
en entreprise de sous-traitance le contrat de
mission individualise, divise, met en concurrence,
les travailleurs et travailleuses. Notre
force collective est en danger.
Si nous ne
réagissons pas maintenant il sera plus difficile
de réagir une fois le contrat de mission
mis en place.

Pour ceux et celles qui pensent que la CNT
est systématiquement « contre », il faut
savoir que le contrat de mission n’est pas
une mesure isolée.
Le rapport de Virville
contient d’autres attaques contre les acquis
sociaux : contre l’ensemble du Code du travail,
contre les prud’hommes, contre les restrictions
aux licenciements, contre le repos
hebdomadaire, contre les temps de pause,
contre les congés payés. Qui est contre qui ?
Il existe une opposition de fait entre les intérêts
des travailleurs et travailleuses et les
intérêts du patronat. Celui-ci avec l’aide de
l’Etat agit contre l’intérêt des travailleurs et
travailleuses. Nous devons donc nous
battre pour défendre nos intérêts.

La « loi de mobilisations pour l’emploi »,
quelle que soit sa mouture finale fait partie
d’une stratégie de casse générale des
acquis sociaux
 : retraite, sécurité sociale,
indemnités chômages, conditions de travail,
services publics... Tout y passe. Il s’agit d’une
véritable régression sociale au profit du
patronat. Mais les patronNEs ne sont pas
tout puissant. Sa force est le fatalisme et la
divisions des travailleurs et travailleuses.

Nous devons nous unir, et nous
organiser, pour construire un
véritable rapport de force capable
de s’opposer au dictat du patronat,
construire une autre société, un
autre futur.

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