Retour sur le débat :
Lors de l’agora, la grande AG de Nuit Debout, un grand nombre d’interventions de plus en plus tendues se sont enchaînées. Deux positions principales s’affrontaient : d’un côté, un certain nombre de personnes qui n’avaient pas l’air de bien savoir de qui on parlait ont expliqué tour à tour que Nuit Debout était une organisation citoyenne ouverte et qu’elle ne devait exclure personne, que si des gens s’étaient égarés politiquement on se devait d’aller vers elles, de discuter et que seule la discussion pouvait les faire évoluer.
De l’autre côté, une douzaine de personnes ont essayé d’expliquer qu’il s’agissait, non de citoyens lambda, mais de militants d’une organisation extrêmement structurée autour de leur chef Alain Soral, antisémites, fascistes, masculinistes, violents, acteurs de régulières agressions, et que de dialoguer avec eux et/ou de tolérer leur présence à Nuit Debout n’était pas une option possible.
Au final l’agora s’est dissoute en petits groupes et chacun.e.s a pu continuer à débattre.
En réaction à ces propos, il nous a paru essentiel de revenir sur cette question.
Depuis près d’une semaine que le mouvement Nuit Debout Lyon existe, l’un de ses principes majeurs, au cœur de ce processus de formation politique, est la libre expression au sein d’une agora publique. Ce principe est défendu par une majorité de participant.e.s au nom de valeurs démocratiques et citoyennistes.
Comme son grand frère le mouvement des Indignés français, Nuit Debout refuse toute affiliation politique et n’hésite pas à se définir apolitique alors même qu’il est un lieu de débats et de confrontations de positions politiques très diverses. Cette logique, qui à première vue paraît louable, peut amener à ce que n’importe qui vienne et répande ses idées.
Le problème, c’est quand ce n’importe qui cache des militant.e.s d’extrême droite avançant leurs idées de manière déguisée, sous couvert de "démocratie" (un comble pour les défenseurs d’un projet de société totalitaire) prônant la haine contre des pans entiers de la population.
Que l’on soit bien clair, Nuit Debout est et doit rester un espace ouvert à toutes personnes sincèrement motivées à s’engager contre la Loi travail, c’est un espace qui permet notamment à des personnes qui n’ont jamais milité de discuter et de se former à travers des échanges et des rencontres. Mais ce mouvement s’inscrit dans une perspective de convergence des luttes. Il est donc « de gauche », à la recherche d’un système horizontal, plus égalitaire.
Si Nuit Debout veut -et de nombreuses limites y font déjà obstacle- être un espace ouvert et s’ouvrir comme il le proclame au-delà du centre-ville, il se doit d’être un espace "sécurisé" pour les minorités opprimées (parce que racisées, parce que croyantes, parce que meufs, parce que LGBTI, parce que précaires et invisibilisées ...), qu’a-t-il à gagner à inviter des fascistes qui, quand ils ne participent pas à des agressions physiques contre les diverses minorités, vont légitimer ces oppressions et défendre des positions réactionnaires ?
Qu’une personne qui a voté une fois FN parce qu’elle s’est senti trahie par le reste du monde politique vienne à Nuit Debout, elle sera tolérée dans la mesure où elle respecte cette convergence des luttes, notamment la lutte contre les discriminations. Elle pourra alors prendre le temps de discuter, d’apprendre, de comprendre et de construire les alternatives qui lui manquent. Mais qu’un militant d’une organisation qui diffuse massivement des discours antisémites, ou prône l’agression homophobe comme sortie du dimanche, participe à nos côtés à ce mouvement, il en est hors de question !
Ce fantasme de l’alternative non politiquement située est au fond extrêmement dangereux : sans horizon politique clair, il est la porte ouverte à toutes les récupérations nauséabondes. Comme le rappelle un des fondateurs de "Nuit Debout Paris", cela permet à n’importe quel cryptofasciste de répandre ses immondices et laisse le capitalisme en prendre le contrôle.
Pour ces raisons, il est nécessaire de rappeler ce qu’est réellement ce groupuscule et qui en fait partie, à savoir des militants qui sont clairement racistes, antisémites, sexistes, LGBTIphobes, complotistes et à la solde du Front National.
Ainsi il serait temps que Nuit Debout se positionne politiquement afin d’éviter que ce mouvement puisse être récupéré par des groupes qui sont clairement les ennemis de nos luttes.
Compléments d'info à l'article
Proposer un complément d'info