Au tout debut de l’audience, la proc demande à ce que soit diffusé un petit film de 7 minutes d’extraits de vidéosurveillance : scènes d’émeutes et de pillages. Le but de la manoeuvre étant de poser une ambiance pour que les inculpés soient plus lourdement condamnés. Heureusement, le juge refuse.
Pour avoir simplement alimenté un feu de poubelles avec un 20 minutes, Samia, 18 ans se retrouve devant le tribunal, avec comme chef d’inculpation « dégradation de biens publics ». La proc demande un an de prison, dont 6 fermes. Un feu de poubelles sur un piquet de grève, quoi de plus banal ? Mais le CPE du lycée Pierre et Marie Curie et la prof d’EPS l’enfoncent à coups de lettres dégueulasses : ils décrivent une meneuse, réfractaire à toute forme d’autorité, qui s’est déjà faite exclure. Le proviseur demande 1000 euros de préjudice pour le lycée. L’avocat commis d’office est encore une fois à l’ouest : il ne lui conseille pas de refuser la comparution immédiate, et devant les réquisitions hallucinantes de la proc, il se défend peu et mal.
Verdict : un mois ferme (sans mandat de dépôt, Samia a donc pu ressortir libre), et 5 mois de prison avec sursis.
Un chômeur de 26 ans de passage à la manifestation avec sa soeur, est accusé de jet de projectiles sur un flic. Place Bellecour, il pique-nique en fin de manif avec des amis. Excédé par les tirs répétés de lacrymogènes, il finit par prendre une pierre et la lancer sur un policier. Il se fait arrêter dans la foulée et avoue directement. La proc : « Voir des dizaines de personnes balancer des pierres et des pierres, on se dit : c’est la guerre ! C’est une scène archaïque dont on a perdu l’habitude dans nos civilisations. Ils saccagent la démocratie que d’autres ont mis du temps à conquérir ». Elle demande 5 mois avec sursis. Hallucinant : l’avocat de la défense demande la même chose ! L’avocat des flics demande 100 euros pour préjudice et 800 euros pour ses propres frais de justice. Là encore, l’avocat de la défense trouve cette requête « modérée ». Verdict : 4 mois avec sursis, 80 euros pour le policier, 250 euros de frais de procédure à payer.
Un chômeur de 19 ans est accusé de jets de pierres sur les policiers. On a retrouvé sur lui un petit caillou d’à peine 2 cm de diamètre, ce qui fera dire au juge : « Sauf à les envoyer avec une fronde, ça ne fait pas de dégâts, ça sert à rien. » Merci du conseil. Là encore, la proc demande 5 mois avec sursis, et ajoute : « Qu’est qu’on peut avoir comme revendication quand on ne fait rien ? », et là encore la défense acquiesce mollement.
Verdict : 5 mois avec sursis.
Enfin la dernière affaire s’ouvre : « Monsieur M., victime : le commissariat du 1er arrondissement ». En effet, le jeune jugé a balancé une pierre sur le mur du comico. Il explique avoir été énervé par les coups de tonfa des flics alors qu’il essayait de prendre le métro. Il a fait une partie de ses études en Algérie. Il se défend seul, ayant refusé l’avocat, et vu comme le commis d’office était mauvais, il a bien eu raison. Le juge lui dit clairement que là-bas il aurait été jugé bien plus sévèrement, et qu’il doit s’estimer heureux d’être ici. La proc demande 4 mois de prison avec sursis. Le juge prononce 2 mois avec sursis.
L’accès aux comparutions immédiates est libre, n’hésitez pas à y assister (surtout en ce moment), et à faire des compte-rendus !
Si on lit bien entre les lignes de cet article, on se rend compte qu’il vaut mieux contacter des avocats de confiance (la caisse de solidarité peut vous en conseiller : caissedesolidarite (arobase) riseup.net ou au 06.43.08.50.32), et refuser la comparution immédiate.
Sortez couverts et à demain !
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