« La culture du viol est présente chez les forces de police », culte de l’Ordre, culture du viol : état des lieux

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Alors que les politiques et la préfecture du Rhône s’offusquent de cet énoncé somme tout assez basique, et que l’élue lyonnaise, ayant osé affirmer cela, rétropédale sous la pression, le collectif « Désarmons-les » publie une analyse détaillée de la culture du viol dans la police.

“Les viols et les violences faites aux femmes dans ce pays et sur le reste de la planète sont innombrables, mais ne sont quasiment jamais présentés comme un problème de droits civiques ou de droits humains. À leur sujet, on ne parle jamais de crise ou de schéma récurrent. Cette violence n’a ni race ni classe ni religion, mais elle est genrée.”

Rebecca Solnit, Ces hommes qui m’expliquent la vie, 2018

Tout d’abord il y a les chiffres qu’on se prend à chaque fois en pleine face : 9 viols par heure, soit 205 par jour. En France, on estime à 198 000 le nombre de tentatives de viol, 75 000 le nombre de viols par an et 10 % des agressions sexuelles qui donnent lieu à un dépôt de plainte.

Puis il y a la violence d’un passage au commissariat pour celles qui en font le choix et la sidération quasi rituelle de faire face à des OPJ hommes, qui induisent un rapport de force et suscitent des incompréhensions.

Enfin, il y a les requalifications, les confrontations avec l’agresseur, les 3/4 des plaintes classées sans suite et toutes celles qui se taisent pour ne pas “faire de vagues”.

À l’heure où certaines féministes en appellent à une police “mieux formée”, il est bon de rappeler différents exemples qui démontrent combien les forces de l’ordre profitent de leur fonction pour soumettre définitivement celles qu’ils considèrent, dans leur for intérieur, comme inférieures.
Les violences du corps policier à l’encontre des femmes sont avant tout autoritaires, alliage entre un pouvoir universel et socialement admis de contrôle et de punition de la part des hommes, qui les amène à s’arroger le droit de jugement, mais également de vie ou de mort sur la victime, moyen de contrôle absolu et définitif démontrant la toute puissance de la sauvagerie masculine.

Les femmes doivent être à la disposition des hommes et doivent être soumises à leurs injonctions, à leurs désirs, et ce qu’elles refusent de donner, les hommes peuvent le prendre par la violence. Ce qui est vrai pour les hommes en général l’est vrai pour les hommes de l’Ordre en particulier. Il est nécessaire de rappeler que les violences policières sexistes sont interdépendantes de la structure et de l’histoire de l’institution policière, mais aussi du systeme judiciaire et carcéral.

Pour analyser cette domination, nous proposons de partir des violences individuelles des hommes de l’Ordre, puis de l’affirmation de leur toute puissance au sein de l’appareil d’Etat, pour aboutir sur les violences dans les lieux de privation de liberté et élargir sur cette question éminemment contemporaine : comment s’affranchir des forces de l’ordre dans nos luttes ?

Avertissement / Trigger Warning : certains passages de cet article font la description de féminicides, de viols, d’incestes, de violences sexuelles et sexistes et racistes. Nous préférons prévenir afin de ne pas heurter la sensibilité de certain.e.s.

Sexisme systémique : comment l’institution se fait complice

On a décidé de partir d’un premier constat simple et documenté : il y a des exemples à n‘en plus finir de fonctionnaires en exercice accusés de violences sexistes et de viols.

De ce constat découle naturellement la question de leur légitimité : comment peut-on confier des affaires de violences sexistes et de viols à des flics eux-même violents, ou en tout état de cause, à une institution totalement incapable de se prémunir de l’existence en son sein de multiples agresseurs et violeurs ?

Une chose est certaine : il est impossible pour des hommes violents d’être en capacité de traiter des violences sexistes.

Dépôts de plaintes : nier la qualité de victime

La première étape de cette domination est de nier aux femmes leur qualité de victime lors de dépôts de plainte ou d’interrogatoires malaisants ou de confrontations insupportables avec l’agresseur.

Nier à une personne survivante son statut de victime, le remettre en cause, l’ironiser, c’est disqualifier le traumatisme vécu. La personne doit faire “ses preuves”, prouver que c’est bien ELLE la victime et qu’elle n’est pas là pour détruire la vie “d’un pauvre homme qui n’a rien demandé”. On assiste à une inversion peu subtile des rôles.

La victime se retrouve à devoir se justifier de ne pas avoir “fait déraper l’homme”. D’emblée elle est préjugée coupable : la suspicion est de rigueur, il faut enquêter. Les agents de l’Ordre recherchent toujours un élément déclencheur qui expliquerait la violence : vêtements, comportement jugé provocateur , infidélité, insultes, présence dans l’espace public la nuit, etc. C’est ce que souligne une femme qui, après avoir subi 45 minutes de déchaînement de coups et blessures de la part de son conjoint, s’est faite condamner par la justice à suivre un stage de “responsabilités pour violences conjuguales”. Elle s’était défendue d’une gifle.
Ce comportement n’est peut être que le juste reflet d’une construction sociétale patriarcale. Combien de fois avons nous toutes et tous entendu, lorsqu’il s’agit d’une agression sexuelle ou d’un viol, l’expression du doute “si c’est vrai“. Ces trois petits mots qui remettent tout en question, et qui impliquent que la victime devra démontrer chacune de ses affirmations. L’incontournable – et souvent insupportable – régime de la preuve.

Ne devrait on pas inverser les rôles ? Croire d’emblée les victimes et faire les procès populaires des accusés ? Pourquoi est-il impossible de croire une femme ou un.e enfant qui dénonce une agression sexuelle ? Quel intéret auraient ils à inventer de telles choses ?

Toujours est il que la société, et par conséquent les forces de l’ordre, partent systématiquement du postulat que tout pourrait n’être qu’invention et qu’il faut protéger l’homme de fausses accusations qui nuiraient à sa réputation et à sa vie.

Dans l’affaire d’un viol subi par une jeune femme de 16 ans à Nîme en 2020, le récit de la victime est qualifié de “fiction inventée” par Eric Maurel, procureur de Nîmes, qui se glorifie dansun article phallocentriquede la lumière faite sur de supposées “incohérences et contradictions du témoignage de l’adolescente“. Le magistrat affirme par ailleurs que “si le viol est dramatique pour une vraie victime, il peut l’être tout autant pour une personne injustement accusée.“. Nous pouvons expliquer à Monsieur Maurel et à France TV info en quoi le viol est un traumatisme laissant des marques à vie, leur rappeler le nombre de violeurs qui jouissent de l’impunité sans être dérangés, et nous pouvons leur parler des amnésies traumatiques et de la difficulté à restituer les faits. Nous pouvons également leur demander de ne pas comparer cela à un simple mensonge, et ensuite les remercier du discrédit qu’ils jettent sur chaque victime de viol en publiant un tel article…

En terme de dialectique de l’excuse, les médias ne sont donc pas en reste.

Confrontation avec le corps policier et interrogatoires à charge

De nombreux témoignages relatent des interrogatoires froids, des questions irrespectueuses et irrévérencieuses pouvant aller jusqu’à estimer la taille du sexe de l’agresseur sur un double décimètre ou savoir si la victime “a lubrifié” pendant le viol, si elle a bien dit non et si elle l’a répété, etc. Les policiers vont également s’employer à établir le portrait psychologique et sexuel de la victime, souvent avant même que l’agresseur – s’il est identifié – ne soit convoqué…

La suite à lire sur : https://desarmons.net/2021/03/08/culte-de-lordre-culture-du-viol-etat-des-lieux

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