Lyon Métropole

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Brèves « Lyon Métropole », de septembre 2011 à janvier 2012. Des caméras aux derniers changements concernant les Hôpitaux Psychiatriques : dernières avancés des dispositifs de contrôle métropolitains. (Lire aussi « en guise d’introduction »).

Cartographie du contrôle

Juillet 2011, 31 caméras de vidéo-surveillance installées à Caluire (notamment dans le quartier de Montessuy et près de la piscine).
Octobre : 2 de plus à Collonges-au-Mont-d’Or.
Décembre : 11 nouvelles caméras installées à Oullins (12 de plus prévues pour 2012). Le quartier des Confluences (2ème) et le 8ème (Grand-Trou, place Louis-Lebret, boulevard des États-Unis et Mermoz) ne vont pas tarder à être équipés à leur tour. Au total, la municipalité PS du Grand Lyon s’enorgueillit d’avoir installé 238 caméras à Lyon depuis 2001. 10% de la ville serrait ainsi « couverte ». Et elle ne compte pas en rester là. Le nombre de caméras devrait être porter à 300 d’ici 2013-2014. Chaque jour, 3 opérateurs se relaient 24h/24 pour scruter les écrans géants du Centre de Surveillance Urbaine – dont la localisation est tenue secrète – et informer en temps réel les patrouilles des « comportements suspects ».

Jamais à court d’idées brillantes, les élus du Grand Lyon vont prochainement confier à un thésard une étude pour avoir « une vue objective, scientifique et rigoureuse » de la vidéo-surveillance et de ses effets. Cette mission, baptisée cyniquement « Surveiller pour prévenir », affiche clairement l’ambition de la politique municipale, et plus largement de toute politique gouvernementale à l’heure où la cybernétique – la science de la prévision – n’est plus un projet utopique mais une manière de gérer le présent : faire en sorte que la politique soit entièrement rationalisée, techniciser. Faire en sorte qu’il y ait une intrication absolue entre politique et science, qui dissoudrait complètement la première au profit de la seconde. Une politique visant à la fin du politique. Pour le dire autrement, il ne doit plus y avoir d’un coté la science, la connaissance exacte et de l’autre les hommes politiques et leurs décisions dictées par des passions, des intérêts, des appétits, des opinions « personnelles » mais une manière de gouverner scientifique basée sur la coordination rationnelle entre un certain nombre de flux d’informations et des décisions, qui sont sensées tomber d’elles-mêmes. Dans cette optique, la caméra devient un capteur, un « outil de mesures et de signalement de dysfonctionnements de l’espace public » produisant en permanence de l’information susceptible d’être utilisée selon la nécessité du moment. Le choix politique de parsemer la ville de ces dispositifs de surveillance n’est alors plus un choix politique mais devient une nécessité dictée par des critères objectifs (être en mesure d’estimer la probabilité de tel ou tel acte suivant le comportement, savoir en temps réel ce qui se passe dans telle ou telle portion de territoire, etc.). C’est sur la nécessité d’être en capacité de pouvoir tout prévoir et d’être en mesure de répondre sans tarder à chaque débordement en n’importe quel point du tissu métropolitain que repose un tel système.

Dans le même ordre d’idées, c’est sur ce désir d’ordre, de certitude et de prévision, que prennent place des expérimentations comme ce nouveau dispositif à l’aéroport Saint-Exupéry : dispositif d’informations en temps réel sur le délai d’attente aux portiques de sécurité, phase la plus « anxiogène » pour les passagers paraît-il. La durée entre l’entrée dans le circuit et le passage sous les portiques de sécurité est donc calculée en temps réel par plusieurs caméras filmant la file d’attente. Le résultat apparaît sur un écran qui affiche un délai d’attente et contribue à créer une ambiance « low stress » dans l’aéroport. Un peu comme les panneaux lumineux qui indiquent le temps d’attente de la prochaine rame de métro ou de tramway. Ou les panneaux autoroutiers qui informent de l’attente probable les automobilistes pris dans des bouchons.

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Fight Club

Dimanche 2 septembre. Bagarre nocturne entre deux groupes de personnes dans le 1er arrondissement. Pour mettre fin au débordement, les flics tirent sur un mec à deux reprises au Taser (pistolet électrique). En soirée, la police quadrille tellement cette partie de la ville, le processus d’aseptisation métropolitain y est déjà tellement avancé, qu’on ne peut même plus s’y battre tranquillement.

Ménage de printemps

4 septembre. Après s’être méchamment embrouillé avec un couple de commerçants, un mec remonte chez lui et commence à balarguer tout son mobilier par la fenêtre rue Paul-Lafargue à Villeurbanne. À 19h, les forcenés du GIPN donne l’assaut en pénétrant chez lui en rappel par la fenêtre. Un cacheton et direction Édouard Herriot. Puis garde-à-vue et comparution immédiate.

Dialogue social

27 octobre. À la Guillotière, un incendie endommage un immeuble rue Montesquieu. Tous les habitants quittent les lieux avec l’assurance d’être relogés, sauf deux familles qui ne payaient plus leur loyer (cette rue regorge tellement de squats qu’on se demande bien qui peut encore faire la connerie de payer chaque mois son loyer). Après avoir passé une nuit dehors, les daronnes réinvestissent le bâtiment avec leurs enfants, des bouteilles de gaz et des bidons d’essence, malgré le vigile. Depuis cette position occupée, elles dialoguent avec la rue depuis les fenêtres. Le deal est simple : soit on nous reloge immédiatement, soit on fait tout péter. En bas, ça s’affole. Gérard Collomb vient négocier, puis le préfet délégué, une adjointe du 7ème. Le GIPN est appelé. Un immeuble adjacent est évacué. Des gens se rassemblent aux alentours vu la présence de tant de flics qui quadrillent le périmètre. Finalement, dans la soirée, le préfet propose plusieurs nuits d’hôtel et une réunion le lendemain avec la mairie du 7ème. Les familles sortent de l’immeuble et prennent un bus affrété qui les emmènent à l’hôtel. Un rapport de force assez concluant.

Un palais flambant neuf

La rénovation du sinistre Tribunal des vingt-quatre colonnes touche a sa fin. Vieux, vétuste, il aurait dû être détruit il y a une vingtaines d’années au profit du nouveau tribunal construit rue Servient. Seulement voilà, il y a eu à l’époque ce manifeste signé par une poignée de « personnalités lyonnaises » pour demander sa réfection. Depuis lors, il fait office de Cour d’assises et de Cour d’appel. Dans les faits, il est une chambre d’enregistrement de l’arbitraire policier : n’importe quel avocat vous dira qu’on y est systématiquement plus lourdement condamné qu’en première audience. Les inculpés des manifs d’octobre 2010 rejugés en appel en savent quelque chose, eux qui se sont vus infligés des peines allant jusqu’à 1 an d’emprisonnement pour de simples jets de pierre en manif. Cet endroit a par le passé aussi abrité le sinistre Grégoire Finidori, juge responsable de nombre d’horreurs judiciaires : le décès accidentel d’un fœtus qualifié d’« homicide volontaire », c’est lui. La relaxe du policier impliqué dans la mort d’un jeune homme, en 1990 à Vaulx-en-Velin juste avant les émeutes, c’est lui. La condamnation d’une mère de famille qui avait volé jouets et nourriture dans une grande surface pour Noël, c’est encore lui, etc. Le vendredi 2 septembre a lieu l’inauguration d’une des deux galeries restaurées. Elle porte le nom du funeste Edmond Locard, père de la criminologie et de la police scientifique, dont le premier laboratoire de police (1910) se trouvait justement dans les sous-sols du tribunal. Ce que la vétusté et la ruine n’ont pas été en mesure d’accomplir, espérons qu’un feu de joie en sera capable un de ces jours.

Tout feu, tout flammes.

17 septembre. L’éclair s’abat sur une cuve de la raffinerie de Feyzin. Le dispositif anti-foudre ne se déclenche pas. L’immense bac rempli d’eau et de résidus d’hydrocarbure prend feu. Il faut une demi-heure aux pompiers pour maîtriser l’incendie.
Deux jours plus tard, c’est un transformateur haute tension à proximité d’un chantier qui prend feu à Vaulx-en-Velin. Et c’est toute une une partie de l’agglomération lyonnaise qui est plongée dans le noir.

Le spectacle du 8 décembre, ses illuminations, ses stands de vin chaud, ses spectacles à la con et ses débordements. Des flics de la BAC en font les frais. L’un d’entre eux reçoit une volée de coups de poings et pieds pendant une interpellation par deux jeunes gens. Résultat : blessure à l’œil et côtes fracassées. 6 mois avec sursis pour les fêtards indisciplinés.

Quand la justice débarque au Vinatier

Réforme de la psychiatrie oblige, c’est désormais un juge qui statue sur le maintien de l’internement des « malades » en Hôpital Psychiatrique. La nouvelle loi du 5 juillet 2011, entrée en application pendant l’été, impose désormais à l’appareil judiciaire de surveiller et de statuer sur les placements sous le régime d’hospitalisations contraignantes (sur demande d’un tiers ou avec l’aval du préfet). Au bout de 15 jours, une décision de justice doit être rendue (puis ensuite tous les 6 mois). Depuis le 1er août, un tribunal siège donc deux fois par semaine dans les sous-sols du Vinatier. Avec un minimum de décors, sans robes – pour ne pas « perturber le malade » –, la « cour », une greffière et une Juge des Libertés et de la Détention (JLD), décide de la sortie ou non des psychiatrisés.
Dans les faits, ça ne change pratiquement rien. Le juge prend toujours appui sur l’avis de l’expert médical, le psychiatre, pour enfermer. Ça a juste pour fonction de décharger les psys du mauvais rôle (priver de liberté) et de les conforter dans leur rôle de « soigneur ». Comme si toute la dimension carcérale d’un Hôpital Psychiatrique (l’architecture, les chambres, le règlement, etc.) ne rappelait pas chaque jour la prison. Avec cette loi, la décision de l’enfermement devient de plus en plus impersonnelle : ce n’est plus le psy qui enferme mais une décision du tribunal. Et ce n’est pas le juge qui décide tout seul, mais l’avis du psychiatre. Tout le monde se renvoie la balle, le « droit du patient » est respecté. Quelle blague. Au fil des audiences, on voit que rien n’a changé. Quand les gens disent qu’ils veulent sortir et qu’ils seraient mieux dehors, le juge mobilise des rudiments de culture psychologique et leur répond immanquablement qu’ils sont dans « le déni ». Exemples d’une séance de tribunal pendant l’été : les infirmiers font rentrer un homme, agent de la SNCF. Il a voulu se jeter dans la Saône et son médecin l’a fait hospitaliser. « Vous êtes d’accord pour rester ici ? », interroge la juge. « Je subis mais c’est prématuré que je sorte. » Les médecins craignent qu’il ne se sauve de l’hôpital. L’homme reste quelques jours puis sera suivi en « ambulatoire ». Vient le tour d’une vieille dame élégante. « Je suis là avec l’accord de mon neveu mais je pensais être en maison de retraite ». La dame chiffonne un sac en plastique et tient des propos confus. Les minutes passent. L’infirmier s’impatiente. La juge la « raisonne », son avocate aussi. « Il faut l’arrêter sinon elle va continuer ». À raison d’une quinzaine de personnes par audience, le temps est compté, il ne faut pas traîner.
Suivent une institutrice dépressive, une alcoolique, des gens qui ne comprennent pas ce qu’ils font devant un juge. Ils demandent un téléphone, des occupations, de quoi rompre avec le quotidien ennuyant de l’HP. Ils posent beaucoup de questions auxquelles ne peut pas répondre la justice. De manière générale, les hospitalisations sont maintenues par le JLD ; plus rarement, elles sont renvoyées pour complément d’information.

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La suite, les brèves de septembre à décembre :

En guise d’introduction : Dernières nouvelles de la conflictualité lyonnaise
C’est une bien curieuse société dans laquelle nous « vivons ». Une société qui se sait absolument détestable et périssable. Une société qui n’a plus rien à proposer si ce n’est de sauver les meubles ou ce qu’il en reste : sauver les emplois, l’économie en crise, la planète. Derrière l’apparente abondance des « projets politiques » et autres « promesses » venant du champ politique traditionnel se cache le chantage à la politique du « moindre mal » : nous gérons comme nous pouvons, disent les dirigeants de tout poil, si nous n’étions pas là, ce serait l’extrémisme, le chaos, la guerre civile.

Police partout
Des flics partout, à toute heure du jour ou de la nuit. Qui patrouillent, contrôlent et font les chauds. Et qui parfois aussi se plaignent, se font mettre à l’amende. Petit tour d’horizon de la condition policière.

En lutte
Profs, cheminots, postiers, putes, pompiers, travailleurs sans-papiers. Les luttes se croisent sans jamais trop se rencontrer. Mais sont autant d’occasions d’organisation avec ses semblables.

Temps de crise
"La Crise". Une aubaine patronale pour reconfigurer l’économie, flexibiliser et licencier sans vergogne ; mais aussi une opportunité pour tous les perdants de la guerre économique d’inventer des combines et de s’organiser avec d’autres pour s’affranchir des patrons.

Guerre sociale
Où l’on voit bien que derrière la tranquillité apparente des centre-villes se jouent des conflits sans merci.

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